Balmino en Broc’n'roll
On l’a connu comme chanteur du groupe Khaban (remember Manon…), puis en solo, sous son nom de Balmino : qui l’a déjà entendu n’est pas prêt d’oublier cette voix-là, forte et déchirante (écoutez Je regarde les hommes tomber…). On l’a vu aussi, avec Stéphane Augagneur et Éric Delbouys (des Têtes Raides) se vêtir de la musique rugueuse du bon Tom Waits. Revoici ce trio, renforcé d’Alice Perret, en une autre formation au gros son, Broc. Dans le mot Broc il y a le roc. Et le rock. Voilà le nouveau postulat du lyonnais Stéphane Balmino : un rock’n’roll, en français (mais pas toujours), au son vintage, précieux, comme la recherche d’un millésime idéal, entre Waits et Led Zep’, y coller ses mots musicalement calligraphiés, les fondre dans la puissance des instruments saturés.
Quitte à faire, Balmino ne fait pas dans la joie et la bonne humeur. Dans les mots qu’il faut parfois chercher derrière la musique, le propos est souvent grave. Ici il est question de séparation, là d’amour et de mort en des dramaturgies qui frisent le lyrisme. « Tomber / Se relever / Se Souvenir / Oublier… », Broc est une vie de heurts, de malheurs, « chienne de chienne de chienne de vie » sans vraiment d’accalmies. Pour peu, le contenu du livret et ce qu’il y a sur le disque feraient opéra rock, dans l’outrance, la démesure, gris clair qui fonce dans la noirceur de situations et de maux, « lové dans l’égout de nos misères. »
Si on accepte le son brut, si on se met au diapason, on trouve ici un disque d’une rare élégance (comme le sont aussi le digipack et son livret), d’une vraie puissance. D’écriture et d’interprétation il va de soi, ce qui ne peut nous étonner de Stéphane Balmino. Pour lourd qu’il soit, le gros son ne manque pas non plus de cette folle élégance, qui nous renvoie au temps de grands classiques, de plus forts encore qu’eux. Joli travail en tous cas qui ne succède pas au précédent Balmino, qui s’additionne et ainsi enrichit singulièrement une palette déjà convaincante.
Broc, Des trucs qui poussent, autoproduction/L’autre distribution, 2013. Le site de Broc, c’est ici.
Khaban, c’était bien, le grand choc « Balmino » ce fut « Le tango du qui » pour Olivia Ruiz, découvert en scène aux Francos 2004, un texte puissant et une intérprétation formidable, du niveau de Diane Dufresne dans un grand jour …
Un album magnifique, acheté il y a quelques semaines, et qui ne quitte la platine du salon que pour rejoindre l’auto-radio. Un plaisir rock et brut, à partager… » Et passe le temps, repasse le temps… »