Chiche Loraine
Y’a une niche, une subdivision pour ça dans la chanson, pour ces chroniques de la vie quotidienne faites de mille tracas, des soucis de la vie, des maux du monde, de la famille et des amis. On bâtit des carrières là-dessus. Demandez à Lynda Lemay, grande prêtresse du genre à ce jour inégalée, qui liste les bobos puis les chante comme vous vous feriez la liste de vos courses.
Loraine Félix c’est un peu ça ! Heurts et malheurs de la vie quotidienne. Ça vit, c’est drôle, ça l’est parfois moins : on compatit en mesurant la proximité de ce qu’elle chante avec nos vies, en se disant qu’il y a décidément bien des malheurs et qu’on en fait partie. Ou pas. Pour rééquilibrer, pour faire relief, elle fait aussi dans la tendresse et, là aussi, c’est plutôt réussi. De toutes façons plus sur disque qu’en scène où elle se mesure trop, n’ose pas ou ne sait pas oser, timide, trop timide. Du coup elle y semble s’économiser… Chiche Loraine ! C’est dire si faire connaissance avec elle par le disque est plus efficace.
« Vue et appréciée » comme dirait mon collège Norbert Gabriel, en Suisse, à la Médaille d’or de Saignelégier (où elle concoure de temps à autres). Où, c’est vrai, il est difficile de se faire une juste idée sur trois titres seulement. Où il est justement nécessaire, vital presque, de se donner en entier, dès l’amorce, pour convaincre, pour vivre pleinement, intensément, ses textes. Alors, il faut y aller ! Chiche ?
Car le répertoire de Loraine explore toutes les facettes de l’interprète (artiste complète, elle signe aussi textes et partitions), revisite tous les états, fait étal d’émotions. La joie, la tristesse, l’indignation, l’étonnement, la colère… Les états, les étapes de la vie, la naissance, les premières règles qu’on attend, les garçons qui viendront, ceux qui sont venus, un viol, la cohabitation de colocataires, l’amour, la prime rupture, la cigogne…
C’est humain, c’est très féminin, mots délicats et belle interprétation. Des larmes peuvent perler sans honte sur les joues. Nous avions loupé ce disque à sa sortie, mais sa sortie ne fut qu’helvète et NosEnchanteurs alors balbutiait : il était bon et bien de se rattraper.
Loraine Félix, Mine de rien, Suisa/Disques Office (2009). Le site de Loraine Félix, c’est ici.
Belle découverte. Merci Michel.
C’est comme un journal intime qu’on aurait ouvert par hasard , et où l’on se retrouve , mine de rien …Une belle écriture, une belle voix et des musiques qui soulignent les chansons tout en finesse …Alors oui, ces quelques chansons donnent bien envie de dire chiche !
Chiche, pourquoi ? Emouvante, plutôt, voix modulée et expressive, textes et musique magnifiques, un accompagnateur, Thimotée Haller, juste et en parfaite osmose. Devrait-elle faire de grands gestes pour « oser ». Edith Piaf bougeait peu sur scène, et pourtant, quelle présence !
Soleille : pas chiche dans le sens de rapiat, mais chiche d’aller la voir sur scène , parce que justement ça donne bien envie .