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Nitchaeff lutine en paradis

Son antre est une baraque à chansons, à Lutry, pas très loin de Lausanne. Chaque saison, cette maison-institution régale les amateurs du meilleur du genre, tant que ça frappe l’esprit : c’est un connaisseur qui vous le dit. Lui, c’est Alain Nitchaeff, jadis Luxembourgeois natif de Belgique vivant sa francophonie en Suisse romande. Il est acteur, romancier…

Et programmateur, on le sait aussi et surtout. Et lui-même chanteur, on le sait moins. Un dont l’art oscille, pour vous le situer, entre Leprest et Escudero, dans les micro-sillons de Brel, de Ferré… le haut du panier assurément. A ses propres chansons, il n’hésite pas à joindre souvent celles d’autrui. De Tachan, de Leprest. De Joyet, Ruiz, Rinaldi, Lantoine, Brel même. L’amour du beau texte qu’on postillonne, qu’on éructe, qu’on vit intensément en ses tripes, en son âme.

Le répertoire de Nitchaeff grenouille de gens dont il décortique la personnalité, narre des tranches d’histoire, nous régale d’anecdotes, étale l’état d’esprit… C’est bien simple, son dernier opus (enregistré à la maison comme les précédents) n’est fait que de ça : Paolo, fils de mafieux ; Maria, fille de joie ; André, le curé ; Philibert, l’aristo ; Dimitri, le clodo ; Kevin, le dealer déjanté ; Big Mac, l’ermite peu solitaire, Mamadou, le cuisinier, Abed, terroriste peu motivé ; et quelques autres encore, rien que de l’humanité ! Il endosse les défroques de ces personnages, vit leur vie d’ici-bas, parfois de très bas. Faut dire que Ça y est, c’est fait, Nitchaeff franchit le pas du trépas : « J’ai vu ma vie qui défilait / Sur l’écran blanc du cristallin / Ça se bouscule au portillon / Comme une nuée de papillons. » Il veut ressusciter mais le bon dieu, qui en bon père ne l’a jamais fait que pour son fils, ne peut au mieux que le réincarner, en des personnages cousus main que Nitchaeff n’a jamais vécu. Et notre Alain vit ses vies, sévit ses vices, du dedans, presque en purgatoire… Ce n’est pas que ces vies soient passionnantes, encore que, mais les portraits sont puissants, l’écriture exigeante et l’interprétation à la hauteur de l’enjeu.

Il n’y a vraiment que l’enregistrement, cette prise de son live, qui souffre un peu, qui manque de souffle, ne rend pas justice ni aux musiciens ni à la voix grave et belle du chanteur… Il suffirait de presque rien, une belle production bien léchée, des sous, pour que cet album soit important et souvent se succède à lui-même sur nos platines.

Nitchaeff est, sur sa scène de Lutry, accompagné de contrebasse, violon, piano, saxs, trombone et guitare, sous l’œil extérieur de l’ami Romanens. L’essentiel des musiques et tous les arrangements sont d’Antoine Auberson, qui n’est autre que le frère de Pascal, un autre grand de la chanson romande.

Alain Nitchaeff, En mon âme ai confiance (2012), Productions Bleu de plume. Téléchargement itunes iciLe site d’Alain Nitchaeff c’est là. Image de prévisualisation YouTube

 

 

 

Une réponse à Nitchaeff lutine en paradis

  1. Eric 1 octobre 2012 à 18 h 07 min

    Je confirme, l’Esprit Frappeur est un lieu magnifique où j’ai passé de bien belles soirées avec Bühler, Leprest, Allwright, Sarcloret et bien d’autres.

    Il m’est plus difficile d’y aller maintenant que j’ai décidé de lâcher ma voiture pour les transports publics mais j’essaye d’y aller au moins 1 ou 2 fois par saison.

    Et je vais de ce pas, ou plutôt de ce clic, me procurer le dernier-né du maître des lieux.

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