Manu Lods, fichu métier que le sien
« Dans l’temps j’étais intermittent / J’courais l’cachet partout tout l’temps / J’étais content quand au compteur / J’avais 507 heures (…) Chanter c’est plutôt chouette comme job / Mais ça rapporte un peu peau d’zob / Et quand ça veut pas décoller / Faut bien s’résoudre à s’recycler / ‘lors on r’tourne sa veste à carreaux / On s’en va chercher du boulot / On jette l’éponge on sèche l’école / Des princes de la picole / C’est comme ça qu’j’ai quitté l’sentier / Des chanteurs et des va-nu pieds / J’exerce enfin dit mon banquier / Un vrai métier. » On se doute bien que le métier de chanteur est difficile et que, sauf à s’appeler Obispo ou Pagny, en vivre relève de l’exploit. Fauché, Manu Lods en tire les conséquences, brave l’interdit et se choisit donc un vrai métier. Et le chante comme on va à confesse. Voilà pour la chanson-titre. On connaît ou non Lods, ça fait presque trente ans qu’il sème ses chansons redoutablement bien construites, qui oscillent entre Bénabar et Renaud, nourries du quotidien, de p’tites choses drôles comme de menus tracas, de fêlures et de tendresses infinies. Son premier album, en 2005, nous parlait beaucoup de filles. Le temps a passé et c’est en père qu’il parle désormais (« Je m’demande si j’ai pas lâché la proie pour l’ombre »). De là à évoquer ses propres souvenirs d’enfance sur Les épaules de mon père… Comme Renaud, il chante cette vie qui passe, les enfants qui naissent et grandissent, cette nostalgie d’avant et cet amour du présent. Avec aussi cette vigilance de chaque jour, ce regard critique sur l’actualité, reconduites à la frontière comme contrôles policiers musclés : J’ai laissé dire est un remake musclé et réactualisé du poème du pasteur et théologien allemand Niemöller (« Lorsqu’ils sont venus chercher les communistes / Je n’ai rien dit, je n’étais pas communiste… »)
Un superbe hommage à Manu Chao, une poignante chanson sur les juifs durant l’occupation, une autre en miroirs où le Lods de désormais, qui porte son armure d’homme, s’adresse à celui qu’il fut plus jeune… Lods fait bien plus que de belles chansons : il excelle dans ce fichu métier (qu’il y reste !). Si vous ne le connaissez toujours pas, secouez votre disquaire ou votre vendeur Fnac s’il ne l’a pas en bac : ce serait dommage de passer à côté, c’est un des plus beaux investissements qui soit.
Manu Lods, Vrai métier, 2012. La page myspace de Manu Lods, c’est là. En vidéo, des images d’il y a trois ans au Forum Léo-Ferré. (ce billet est une version augmentée d’une chronique discographique parue dans Le Petit Format) http://www.dailymotion.com/video/x8j60e
Et l’écho répond « Putain d’métier » , par notre cher Ricet, allez un p’tit tout avec lui pour commencer la journée,