Festiv’Art 2012 : Cyril Romoli, le coeur gros comme ça
Est-ce pour faire un clin d’oeil à son amie Jeanne Plante que Cyril apparaît ce 16 Août, en veste de velours (Jeanne chante Allez viens /Mon bel amant d’un soir/Me dire je t’aime /En costume de velours) ? Nous ne le saurons pas mais comme c’est bon cette pincée d’élégance pour notre rendez-vous ! C’est avec beaucoup de légèreté que Cyril s’installe au piano, usant immédiatement de l’autodérision en feignant de se regarder dans un miroir : « Je comprends pourquoi elles sont toutes folles de moi … »Tout au long de son concert, il joue de toutes les ressources de son visage dans de franches grimaces. Clown au coeur gros comme ça, Cyril ? Un peu, beaucoup sans doute, lui qui, le plus clair de son temps d’artiste, arpente les scènes de théâtre. Comédien ? C’est indéniable et même rivé ainsi à son piano il parvient à nous en montrer bien des facettes. Parfois même on hésite, on ne sait plus très bien s’il joue ou dit « vrai »… comme lorsqu’à plusieurs reprises il perd le texte de sa chanson. « C’est la soirée des trous… je vous la ferai plus tard si elle revient… » Le public aime. Il applaudit à cette vérité du spectacle vivant. Le bonheur de la scène est là, dans cette mise à nu, ces imprévus, ces impromptus. Cyril annonce ainsi sa douce chanson Le Pull en l’offrant aux gamins que l’on entend gambader sur le site du festival : C’est pour vous !… Rien que pour cet instant, on peut se réjouir de ce concert. La chanson débute ainsi : « T’es qu’une idée mais elle est belle/Rien qu’une pensée qu’a tout pour elle/Et qui s’agite sous son pull... »
Cyril rit, sourit, grimace, oui… et pourtant les textes sur lesquels il compose, les textes de ses auteurs (à commencer par Eric Chanteleuze) ne disent rien de très lisse, de très rassurant. La mort rôde tout le temps et Cyril se joue de cette tragédie de nos vies. C’est précisément ce que j’aime dans son univers. J’aime ce grand échalas, au coeur usé qui s’éprend de Cathy, vendeur chez Tati, et qui la verra passer sous le bus 54 le jour de leur premier rendez-vous (et dire que c’est avec cette chanson là que Cyril se vit éliminer du concours du Pic d’Or ! ) j’aime cet amour d’outre tombe « Rejoins-moi au néant/je n’aurai pas perdu mon temps… », j’aime Camille et cette sensation d’évanescence qui parcourt la chanson « Le jour blémit à la fenêtre/Je m’efforce de te garder/Mais ton parfum va disparaître/Dans les plis du coton froissé »… J’aime les Vahinés où plane l’âme de Gauguin, j’aime l’étrange évasion des yeux du gars « N’ayant de cesse /De regarder les fesses/Des jolies femmes noires » et qui terminent leur fugitive évasion sous la chute du grand gars de chez Tati criant ma Cathy… Enfin que dire de l’évocation du marin qui n’a ja-ja-mais navigué, en cale sèche à Barbès à regarder les hublots de la laverie automatique, que dire du rêve de « finir sa vie en tube creux », en stylobic d’un gars qui veut faire dans la chansonnette ou de cette prémonition : « Je vais mourir dans les années 50/J’ai l’habitude d’être en retard ? »
Cyril est reparti avec son monde fou au bout des doigts et dans sa voix… En ce moment, il répète pour le théâtre. Le monde de la chanson se fait trop rare pour lui.
Le site de Cyril Romoli, c’est ici. Ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.
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