FestiFaï 2012 : La chanson hors de ses gongs
Jeudi 26 juillet. Configuration particulière ce soir au Café du peuple, tous massé que nous sommes devant le zinc, comme un autel, sacro-saint piano devant. Des cloches et des balles dessus, des jouets aussi. Et ce zig entre tous singulier, ce Grégoire Gensse qui frappe des mains, prend son corps pour tambour, fait son de sa voix, sens de son insolite démarche, de ses incongruités fruitées. C’est intense, c’est fou. Et la salle de suivre cet exercice quasi tribal, ces Bali-Veynes sonores et puissantes, exaltantes. Et ce fou de poursuivre au piano, faisant feu de tout le bois de son instrument, tirant des touches et de sa quincaillerie annexe des trucs improbables que nul ne sauraient imaginer et qu’on ouïe les oreilles bées et les yeux pareillement écarquillés. C’est tout aussi symphonique que vous, tas de bruiteurs. Car, la surprise passée, Gensse apparaît pour ce qu’il est, non une attraction de fête foraine, non un farfelu fantaisiste, mais pour un musicien haut de gamme, un génie, un touche-à-tout des notes, Géo Trouvetou des sons, qui manie l’absurde, l’humour et la pure poésie aussi sûrement que sa gamme. Pour peu, on se demanderait presque où il pu cacher son gaffophone…
On se dit que le suivant aura du mal à le faire oublier. La suivante en l’occurrence, que voici. Ci-devant Lior Shoov, tenue d’extra-terrestre, cheveux en bataille, assise sur le zinc, le cul sur la commode. Lior, israélienne domiciliée à Paris, vient nous faire « troublage public ». C’est une folk-singer, un peu blues, presque gospel, qui n’est pas sans parfois faire songer à Dick Annegarn ou Steve Waring. En anglais, en français ou en hébreu, la demoiselle à de singuliers vers, bruts de forme, bizarres… Et des sons inattendus, venus d’ailleurs, d’autres cultures assurément, parfois simplement de Jouet-Club. Dans sa foirfouille de bidules à faire du son, aux côtés de senza ou de clochettes, d’harmonica ou de hang (une soucoupe volante aux envoutantes sonorités), le jouet n’est pas absent, loin s’en faut, y compris pour cultiver des gags à foison. Fatras de notes qu’accompagnent des textes étranges, à peine ébauchés, rudimentaires, d’où jaillissent de temps à autres des choses essentielles, des cris d’amour, des phrases non négociées. Et, par elle petit bijou, une reprise de Toi, mon amour, mon ami de Marie Laforêt, épure débarrassée de sa gangue d’origine faussement slave… Nana étonnante vraiment, que les parisiens peuvent parfois applaudir au Limonaire, que nous avons ici ce soir à nous, pour nous, dans une prestation qui tient de la performance, de l’incroyable, de l’exaltant, de l’exubérant, loin des canons de la chanson, absente de tous formats dans lesquels Lior l’indomptée ne saurait de toutes façons s’inscrire. Lior est comme un cheveu dans la soupe, une fraîcheur inexplorée. Sa prestation est bien au-delà des mots, elle est aussi tribale, tripale. Je maintiens : Lior est une extraterrestre. Et si elle n’est pas de notre race, elle est du Clan mongol.
Oui, Greg Gensse est un OMNI (Olibrius Musical Non Inhibé [ô combien] présent qui, outre ses talents multiples est un type formidable et d’une ouverture rare : on n’a certainement pas fini d’entendre parler de lui…
Même chose (pour d’autres raisons) à propos de Lior Shoov.
En tout cas, les articles de Michel Kemper donnent furieusement envie de découvrir ce FestiFaï dont les programmateurs ont manifestement les oreilles grandes ouvertes…
Et il faut aller voir Greg avec son « Verybigexperimentaltoubifriorchestra »…. renversant d’énergie , d’ubuesque, de folie douce!!!