Bénabar, produit déjà périmé ?
Sauvé dans Lancer de disque, Saines humeurs
Tags: Bénabar
Rappelez-vous, c’est pas si loin. Ça n’a, somme toute, que deux quinquennats. Bon anniversaire, Y’a une fille qu’habite chez moi, Dramelet, A notre santé…, chapelet de chansons mémorables d’un nommé Bénabar. Et, de suite, un succès qui va grandissant, délaissant vite les salles confidentielles pour les Zéniths. Bien sûr, Bénabar n’est pas né comme ça, d’un simple claquement de doigts. Il y eu un premier album avant, Bénabar & Associés, en 97. Et, précédemment, le duo Patchol et Bénabar, dès 1994, mais, ça, personne ne s’en souvient.
C’est quasiment tout neuf, vierge de toute écoute, que Bénabar est entré dans notre culture chanson pour de suite gagner le grand public, l’enflammer en scène, par ses chansons cuivrées et sa posture quasimodesque et immodeste. Ah ! le grand public, au sens de nombreux, qui ne sort en Zénith(s) que deux ou trois fois l’an et va là où on lui dit d’aller, vers le succès balisé. Succès n’étant pas incompatible avec qualité (sauf à vouloir se garder à soi, rien que pour soi, des artistes « maudits » et tricards des médias), il nous fut agréable pour une fois d’être dans le ton, dans l’air du temps, d’allumer sa radio et d’avoir raison. Les risques du métier, en 2003, confirma bien encore notre impression des débuts ; Bénabar s’inscrivait pleinement dans une variété populaire haut de gamme compatible avec nos exigences chanson.
Alors pourquoi nous lasse-t-il à ce point désormais ? Ni Reprise des négociations en 2005 ni Infréquentable en 2008 ne nous ont convaincu. Pire, ces albums ont gagné notre relative indifférence. Certes ils se sont vendus, comme quand on met dans son caddie des réflexes d’achats conditionnés, des achats d’impulsion.
Tout passe, tout lasse. La variété a fondamentalement en ses gènes une date de péremption que seule peut sauver la nostalgie ; la chanson non. L’obsolescence ne frappe ni Brel ni Brassens, ni Caussimon ni Barbara, ni Sylvestre ni Desjardins. Bénabar si, qui nous fatigue à présent ; vraisemblable qu’il se fatigue aussi. Il n’aurait pas dû se vautrer dans le rouge canapé de Drucker, à faire du politiquement correct. Maintenant il le chante, le Politiquement correct (vidéo ci-dessous), et c’est mauvais, fadasse, transparent. D’aucuns tiendront ça pour courageux, ça épouse tellement de causes que ça n’en épouse aucune, ça peut faire anti-Sardou mais ça vise le même auditoire : celui des Zéniths et des ventes massives en tête de gondole. Politiquement correct, prêt-à-penser, ce disque en est plein. Au final, au bout de l’écoute, il n’en reste rien, sujets élimés, déjà périmés… La date de péremption est, cette fois-ci, exagérément courte.
Bénabar, Les bénéfices du doute, 2011, Sony Music. Le site de Bénabar, c’est là.
Cet article était en grande partie déjà rédigé que je me suis rendu compte que Bénabar était aussi le sujet du dernier billet de Baptiste Vignol sur son blog Mais qu’est-ce qu’on nous chante ? Comme quoi…
Bonjour Michel,
Je ne suis pas particulièrement une fan de Bénabar et je crois même qu’il ne m’a jamais vraiment intéressée. Néanmoins, je me sens toujours un peu mal quand on oublie qu’un artiste peut faire des erreurs, qu’il peut « louper » quelque chose, qu’il peut se perdre quelquefois. Je peux comprendre tout ce que tu écris, tu as sans doute raison bien sûr, mais ce petit rappel amical me semble nécessaire et juste.
Bien amicalement,
On voit bien au travers de cet exemple, la difficulté à « rester » artiste dés lors que les contraintes et la temporalité de la logique de la production pèsent sur la création. Mais quelle difficulté de ne point succomber à ses sirènes, de revenir à chaque fois aux sources du métier et sans se laisser tenter par l’idée du « refaire », poussé par la volonté d’être encore écouté aujourd’hui comme on l’a été hier. Pourtant, c’est ce « comme » qui est trompeur : tout succès d’un titre ou d’une chanson ne peut être revécu. Il est passé. Courir derrière le succès, c’est peut être un peu la mort de l’art ou plus modestement la faiblesse de l’artiste. Le succès est une conséquence et non un but. C’est là un des pièges pour ceux qui l’ont connu. Les plus grands, sentant son piège, se sont redonnés cette liberté, sont parfois partis, ou savent se taire pendant longtemps. La temporalité de l’art n’est décidément pas celle du marché… Paradoxalement, Bénabar nous parle d’un vrai risque du métier…
Vous avez écouté l’album, mais l’avez-vous seulement compris ? J’en doute fortement à la lecture de votre billet…
Pourquoi tant de mal ?
Est-il de bon ton de ne pas aimer Bebabar comme il le fut de la vénérer ?
Qui sommes nous pour juger ?
Qu’avons nous fait qui nous en donne le droit ? Ne gagnerait on pas tous avec un peu de retenue ? Et en écoutant vraiment l’album incriminé. (« moins vite », « mirabelles » ou encore « faute de goût » sont des jolies chansons… Sans prêt à penser.
Nous sommes encore quelques personnes à nous rappeler l’existence du duo « Patchol et Bénabar » qui a fait ses classes dans un « p’tit lieu » aujourd’hui disparu, tenu par Boris, Kiki, Lolo, Mike, et une joyeuse bande de bénévoles : l’AILLEURS.
Des remerciements à ces personnes figurent sur la liste figurant sur les deux premiers CD de Bénabar solo.
C’est après la séparation du duo (condition) et avoir été signé par une grosse prod, que les choses se sont affadies, et sont devenues plus… « tièdes ».
Chris Land
Bref, Bénabarbant, quoi !
C’est politiquement correct !!! juste le miroir… De qui… De nous ? De rien… Le miroir aux alouettes… La vraie chanson supposée subversive se doit de et se vie dans la proposition… Ici il n’y a rien ! je n’entends rien ! ni texte ni Musique ! Tout frais pondue… Prés fondue dans le moule.
Eric Guilleton.
Article bien écrit comme d’hab’. Mais je ne suis pas d’accord. Et parler de fadasse et transparent pour Benabar est un peu cruel. Ses chansons sont plus ou moins bien en ce sens qu’elles me parlent plus ou moins selon les thèmes. Mais je trouve toujours que Benabar est un des meilleurs dans l’écriture de chroniques de la vie et de billets d’humeur. Ce sont toujours des nouvelles de bonne qualité.
Enfin je vous trouve de mauvaise foi de reprocher à un artiste son succès (vente de disques et remplissage de salles); écrire qu’il vise le même auditoire que Sardou est incroyablement injuste…
Permettez-moi de vous dire que pendant que on parle de ce genre de chansons fades comme celle-ci, sans mélodie et des lieux communs tenant lieu de texte, on ne découvre pas « nos enchanteurs »
Marc Havet chanteur têtu
http://www.marchavet.com
http://www.aumagique.com
Je viens de faire des spectacles avec Michel Bûhler, Sarcloret, Manu Lods et autres « enchanteurs »…..
Mettez-nous des enregistrements et des vidéos de ces artistes et tant pis pour Bénabar !
Merci
Réponse: Qui aime bien châtie bien et ce billet est à la hauteur de ma déception quant à Bénabar (c’est la première fois que je parle de Bénabar sur ce blog, j’aurais dû commencer par publier d’anciens papiers exaltés)… Du reste, ce blog n’est pas qu’une succession de portraits de chanteurs (d’enchanteurs) à découvrir et de chroniques de leurs disques. Ce n’est pas un service public où, chaque jour que dieu fait (je ne suis pas certain qu’il y soit pour quelque chose, lui), le lectorat de ce blog a son artiste à découvrir. Je vois ce blog un peu comme une actualité subjective (c’est la mienne ; ça peut être celle d’autres s’ils veulent y collaborer – on peut rejoindre la fidèle Catherine Cour dans cet exercice…) de la chanson, avec ses différentes rubriques, dont celle des « Saines humeurs » qui est à peu près la seule qui nous permette de dialoguer ensemble par les commentaires, des commentaires en général de très haut niveau (merci à tous les commentateurs que vous êtes). Je prends parfois un malin plaisir à écorcher un peu : j’ai mes favoris, certes (l’aqueu Johnny, Carla le femme de qui on sait, Mickaël le très trépassé…), et m’en amuse. J’ai mes coups de gueule et sachez, Marc, que chaque coup de gueule fait son buzz. Chaque buzz amène à ce blog un public plus conséquent. Après chaque buzz, le public fidèle à NosEnchanteurs est plus important encore (depuis deux mois une moyenne journalière de plus de 650 connexions + près de 300 abonnés = pas loin de 1000 par jour !). C’est ce public fidèle, de plus en plus nombreux, qui découvre ici des artistes qui n’ont guère accès aux autres médias. Je vais bientôt faire un papier sur Jérémie Bossone (une vrai coup de coeur, ce gars-là !) : quitte à faire, je préfère alors qu’il ait mille lecteurs plutôt que cent. A bientôt, Marc, et merci pour votre fidélité. MK
« La variété a fondamentalement en ses gènes une date de péremption que seule peut sauver la nostalgie ; la chanson non. L’obsolescence ne frappe ni Brel ni Brassens, ni Caussimon ni Barbara, ni Sylvestre ni Desjardins. »
La prochaine fois que je te rencontrerai, il faudra que tu m’expliques la différence entre la variété et la chanson… Que tu me dises où se situe la frontière entre les deux « genres » ? Serait-elle ailleurs que dans les goûts de chacun ? Quant à l’obsolescence qui frappe, on en reparle dans cinquante ans… Que restera-t-il de tout ça ? Quelle est la durée de vie d’une chanson, qu’en reste-t-il une fois que ceux qui l’aimaient ont disparu
Ben pour ma part, moi qui passe par là, je n’ai jamais adoré Bénabar, j’ai encore moins aimé en concert. Cela dit, je tiens tout de même à dire pour la défense des artistes que le problème de la créativité aujourd’hui c’est peut-être aussi un peu dû au contexte économique.
Des Brassens Brel Ferré Barbara ne serait pas devenus ce qu’ils sont s’ils avaient dû passer les 3/4 de leurs temps à vendre leur chansons. Ca ne retire rien à leur génie, c’est juste qu’un génie, c’est beaucoup de talents et une capacité/possibilité de travail hors norme.
De nos jours sans le site internet, la démo, le public, la vidéo, la plaquette, les photos, les fans, la structure…bref, sans un projet clé en main, rien à faire, personne ne vous écoutera (A moins qu’à force de travail on puisse devenir blonde jeune et sexy avec une très belle voix…). Une fois qu’on est écouté, il faut tourner 8 mois par an pour compenser les pertes du secteur disque…
Où trouver le temps d’être un génie ?
Bon voilà, je passais par là…un petit mot d’encouragement pour Mr Michel Kemper…Je découvre ce site avec enchantement..continuez….
J’aime beaucoup Bénabar auquel je reconnais une belle plume. Il sait conter avec talent ces petites choses du quotidien qui agrémentent ou empoisonnent la vie de chacun et c’est un mauvais procès de lui reprocher de s’aventurer sur des thèmes, si légers soient-ils, qui n’aient été jusque là pas ou peu abordés. Le découvrir sur scène a été pour moi une vraie révélation. Sa présence, sa façon de jouer avec ses musiciens et son public m’ont enthousiasmé.
Malgré cela, je ne peux m’empêcher d’avoir également un regard critique sur son dernier album que je trouve d’une écriture très moyenne et surtout très pauvre musicalement. Si soignés qu’ils soient, les arrangements ne peuvent pas combler le défaut de mélodie. Quant au titre « politiquement correct » je le trouve simplement navrant.
Ceci dit, il ne faut pas pour autant jeter le bébénabar (mouais, facile !) avec l’eau du bain. Je crois en son talent et suis certain qu’il saura rebondir.
C’est peut-être Brassens
Cet entêté chanteur
Jamais on le saura
l’oreille de l’auditeur
n’est pas passé par là ! …
ETC…
A moins que beaucoup plus tard…
A suivre
Je vais sans doute paraitre primaire… voire sans doute éandertalien, et loin de moi l’idée de vouloir vous agresser à tout prix… Mais il me semble que l’idée qui flotte dans votre post est que Bénabar était bien tant qu’il était inconnu : maintenant qu’il est connu, il serait presque à bannir… Je vais me faire huer mais, moi qui adore Bénabar, trouve que rien, justement, n’a changé… Il fait toujours la même chose (comme d’autres de ces illustres ainés)… J’aime ce qu’il fait… avant… et maintenant… et c’est, je pense, injuste de lui en vouloir pour cela.
Réponse : Ni primaire ni Néandertalien ni agresseur, vous n’êtes rien de tout ça. L’appréciation est seulement un peu différente. Le commerce de chansons de Bénabar est simplement étroit qui trouve désormais ses limites. C’est poussif et paresseux, moins inspiré. On a envie de lui dire « eh, bouge-toi un peu ! ». Car je dois vous avouer bien aimer Bénabar. Et qui aime bien châtie bien ! Au plaisir de vous revoir sur ce blog : y’a du Bénabar et plein d’autres artistes. Et parfois un peu de poil à gratter… MK
Vous n’avez pas son talent d’écriture c’est évident…
Et puis comme il le dit si bien « il vous emmerde »
Réponse : Vous êtes contente, Ninie : vous venez de poser votre commentaire imbécile, petit étron qui vous honore… MK
Et je vous rejoins là, j’aime ou j’aimais Bénabar, mais il s’embourgeoise , il s’endort sur ses lauriers et c’est bien dommage .
J’avais raté cette discussion… Moi aussi j’aime bien Bénabar, quelqu’un qui a écrit « je suis de celles .. » a montré qu’il est un auteur respectable … qui n’aurait pas dû se fourvoyer avec ce « Politiquement correct » médiocre.. à la prochaine, ça ira mieux …
Bonsoir.
Bon…
Je suis plus ou moins d’accord avec l’ensemble du billet.
Étant -ou me targuant d’être- maniaque de la lettre musicale, je partage ton point de vue sur la grande déception depuis « Les risques du métier » (Non-inclus).
Déception, désillusion… Qui se transforme vite en rage.
De la rage, oui, jusqu’à en vomir du bloubloubiblique : « Judas ! Caïn ! »
Mais.
(Car un « Mais. » s’impose, surtout après la lecture de quelques commentaires, et donc après l’analyse de quelques points de vue, moins radicaux que les miens, -et si j’ose dire- que les tiens.)
Du temps de Brel, Brassens, Barbara, etc… (Je me permets d’utiliser le terme « du temps », puisqu’il me semble que tou(te)s les artistes que tu as cité datent quand même un peu…), les chansonneux-euses étaient, d’une part, mieux rémunérés financièrement qu’aujourd’hui, et d’autre part, moins agressés-manipulés-censurés par la presse (Lagardère-Bouygues) et les maisons de disque.
S’il faut bien reconnaître une chose, c’est qu’aujourd’hui, succès rime avec soumission. Un artiste est confronté à deux choix : accepter les exigences politiques de ceux qui contrôlent toute la diffusion médiatique, ou bien retourner dans l’anonymat, par censure « indirecte ».
Alors, plutôt que de crier « Au traître ! », ce qui est très tentant, et qui, au final, n’est pas si faux que ça…
Pour ma part, je préfère gueuler, encore plus fort :
« Rendez-nous nos Artistes ! Arrêtez de nous les pourrir, et rendez à la populace télochisée sa liberté de penser, d’apprécier ! »
Je ne m’adresse pas seulement à l’auteur de ce billet, mais sinon à ceux qui voudront le commenter avec haine :
Il y a une raison d’être en colère contre Bénabar.
Mais allez chercher un peu plus loin les responsables.
On nous vole la culture…
pierre.