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Gianmaria Testa, palabres transalpines

Tiré de mes gros classeurs d’émotions de scènes, voici le souvenir de l’italien Gianmaria Testa, lors d’un concert en novembre 2005, salle Pinatel à Saint-Genest-Lerpt, dans la Loire…

Gianmaria Testa a le don d'un ailleurs (photo d'archives DR)

Archive. Le pourtour de scène de cette petite salle est tel qu’on dirait l’encadrement d’un tableau. Une œuvre d’art assurément, avec pour seuls sujets ce guitariste chanteur, Gianmaria Testa, et ce saxo alto et clarinettiste, Piero Ponzo, qui nous font ce soir récital d’excellence.
On pourra toujours classer Testa – ce ne sera pas tout à fait faux – au même chapitre que Paolo Conte et que Roberto Sironi. Même registre ou peu s’en faut, proximité de voix, charme latin… Reste qu’il suffit d’écouter Gianmaria pour savoir que cet ancien chef de gare diffère quelque peu du modèle, que sa focale est plus large, intérieure et contemplative : « Autres habitudes / Pour tes latitudes / Même l’impossible pourrait arriver / Il faut juste un peu de temps »… Il lui suffit de peu, trois fois rien, pour installer et son univers et la complicité qui en découle naturellement : une guitare, une clarinette qui caresse les mots de ses sons, des confidences aussi. Car s’il chante en v.o., notre transalpin palabre d’abondance, en v.f., partageant le temps d’un soir petites remarques et grandes réflexions, comme on rompt le silence pour énoncer une évidence, comme on note sur un cahier une vérité de peur de trop tôt l’oublier. Sur tout, sur rien, sur « Berlusconi, ce mauvais acteur dans un mauvais film dont on savait pourtant le scénario », sur ces Fiat 500 qui sont faites pour tout sauf pour l’amour, sur ces émigrants que nous avons tous été et la façon dont nous les recevons à présent…
Relater tel « concert », c’est constater une scène sans gestes amples, sans exubérance, juste dix doigts sur une guitare et dix autres en clarinette. C’est décrire le calme et la poésie qui nous emporte, les images qui nous arrivent. C’est dire l’étonnante qualité d’écoute du public dans cette salle bondée comme jamais, étonnante parce que, à un tel point, rare. Hors champ, hors temps, Testa a le don d’un ailleurs où il vous emporte, juste rompu le temps de se dire blues-rockeur et d’emprunter au public des lunettes noires pour feindre d’y croire.
Je ne suis pas sûr qu’on tombe sous le charme de Gianmaria Testa : c’est là où, même s’il compte, il n’est pas Paolo. Mais, c’est certain, on tombe en pure amitié. C’est encore plus beau.

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