Gérard Pierron : « Quand on chante Couté… »
Au chapitre des célébrations de l’année 2011, il en est une qui concerne tant la poésie que la chanson : le centenaire de la disparition de Gaston Couté. Toute cette année, sur NosEnchanteurs, nous reviendrons régulièrement sur ce poète paysan, cet anarchiste qui ne hante pas, loin s’en faut, nos belles anthologies de poésies. Pas plus qu’il ne semble hanter ces fameuses célébrations du Ministère de la Culture. Si tant de plumes viennent de s’enflammer sur la présence pour le moins controversée de Louis-Ferdinand Céline, aucun de mes confrères ne semble avoir remarqué l’absence significative de Gaston Couté dans le Catalogue des commémorations officielles de la République. Anar jusqu’au bout des doigts, Couté aura réussit même son centenaire : sans tambours ni médaille… libre !
Le texte qui suit est extrait de la préface du livre Gaston Couté, le temps d’amour à paraître en février chez Piqu&colégraphe. En fait un choix de textes (avec partitions et disque « Le discours du traîneux » joint) fait par le chanteur Gérard Pierron, grand amateur de Couté s’il en est. C’est d’ailleurs Pierron qui signe cette préface
« Quand on dit, quand on chante un auteur de cette trempe, est-ce que l’on se bonifie avec le temps, est-ce que l’on prend des défauts ? Une oeuvre d’un tel tonneau peut-elle être toujours mieux dite ? Son interprète ne connaîtra ni l’ennui, ni la lassitude. Il s’agit là d’un grand classique, véritable trésor littéraire mal connu, voire non reconnu.
Lisez-le à voix haute, il vient du parler populaire et paysan. Que ces écrits, grâce à vous, retrouvent la parole. Vous en saisirez toutes les saveurs, les parfums et les nuances. Vos racines, votre mémoire cogneront à votre porte, c’était hier et c’est aujourd’hui. Que vous soyez de Bourgogne, du Midi, du Québec, dîtes Gaston Couté avec votre accent. Si cela chiffonne certains intégristes patoisants, et il y en a, ça n’est pas grave. Riez-en, mettez-y du cœur, tout simplement.
La musique de ses vers porte ses images comme le souffle du vent envole son chapeau… Posez-vous sur l’épaule de ce bourru de paille et chantez-le comme le ferait un oiseau. Cet pouvantail-là ne porte pas l’habit vert, son épée est un soc de charrue. Immortel, il règne sur les champs de blé à perte de vue.
Ô villages sans emploi
Sans boulanger
Battus par des vagues d’or
Comme des îles perdues
Dans les moissons…
Aucune machine agricole, aussi moderne qu’elle soit, ne pourra rien contre lui. Aucun de ces monstres à tout faire, shootés par une radio diffusant une fausse énergie, ne pourra clouer le bec de cet épouvantail accueillant aux oiseaux, qui marche inlassablement, chaussé des godillots de Van Gogh à qui il ressemble le plus. Qui marche, qui marche sur ce qu’il reste des chemins qui ne sont pas encore mangés. Qui marche, traînant avec lui sa horde de peineux, de trimardeux, de galvaudeux, ses filles engrossées, son p’tit porcher, sa Françouèse et son gros Charlot de cœur. » GÉRARD PIERRON
Gaston Couté, le discours du traîneux, avec Gérard Pierron, Hélène Maurice et Bernard Meulien, le 13 février à La Bouche d’air, salle Paul-Fort, à Nantes ; et du 24 au 27 février 2011, à L’Européen, à Paris.
« Christ tout en boué, Christ de bougeoué »…!!!
Superbe Couté, que… Lavilliers, notre saint immaculé national, avait récité avec talent sur son 1er disque, un premier opus assez attachant d’ailleurs. Merci de nous le remémorer.
C’est vrai, au fait. Nanar avait dit « Le Christ en boué ». Et il avait aussi chanté « La dernière bouteille ».
Du souvenir que j’en ai, c’était plutôt sympa.
Et puis après,il y a eu Gérard Pierron… Et il y a toujours Gérard, qui après Couté, qu’il chante toujours, nous a fait découvrir tous ces merveilleux poètes de la province. Grand merci à lui.
Couté était d’abord un homme, et c’est ce qui fait sa puissance, son éclat : il faisait preuve d’une humanité révoltée et pleine de compassion pour les pauvres, dont il faisait partie, et son talent de poète était au service de cette dimension humaine. Bravo à Gérard Pierron pour sa fidélité à ce sacré bonhomme.
Et aussi Laurent Berger qui chante si bien Jour de lessive.
Réponse Laurent Berger chante aussi J’ai fait des bleus sur ta peau blanche de Couté, et c’est de toute beauté. Nous reviendrons bientôt, sur NosEnchanteurs, sur ces interprètes de Couté : ils sont (belle) légion. MK