Belle des chants
Sauvé dans En scène
Tags: Barbara, Marie-Paule Belle
Il y a quelques années, Marie-Paule Belle a consacré un récital tout entier à (re)visiter l’œuvre de Barbara. Chronique de spectacle d’octobre 2002, au théâtre Albert-Camus du Chambon-Feugerolles.
Archive. « Tu aurais pu attendre un peu / Avant de partir / Que l’on se connaisse un peu mieux / Le temps de se dire / Des choses qui ne servent à rien / Mais qui font rêver… » C’est le rappel. Un titre, un seul. Marie-Paule Belle cesse de chanter Barbara : elle lui consacre simplement une chanson. Au terme de laquelle les douces et chaudes lumières de Rouveyrollis s’éteignent sur un récital de passion et de frustrations.
De passion c’est évident. Pas comme la p’tite lumière rouge à l’autel de l’église où on commémorerait le souvenir d’une disparue, non. Mais comme le plaisir d’assister à un répertoire rare, parfait, le bonheur d’entendre encore et toujours ces chansonnettes-là, parmi les plus belles pages de la chanson française.
De frustrations, oui. Car sans Pierre, ni L’Aigle noir, ni L’Homme en habit rouge. Sans Marienbad… Seule une vingtaine de titres qu’une adolescente, belle et rebelle, se met en cœur et en mémoire, sans savoir que, longtemps après, devenue chanteuse, elle les interprétera en scène, comme un lourd héritage, comme l’évidente filiation d’une idole aujourd’hui disparue.
Je, tu, il, nous, vous, ils ont aimé Barbara. D’amour, tant il est vrai qu’on ne pouvait autrement apprécier cette dame-là. Notre plus belle histoire d’amour, c’est elle. Nous allions l’applaudir à tout rompre. Un borborygme, un geste, un soupir, l’esquisse d’une chanson, même moins, et c’était déjà Barbara. Mots étêtés, voix fatiguée, souffle court, mystique démarche qui tourne derviche, tout était Barbara : l’air, l’ambiance, les pleurs et les frissons, même ces capotes qu’elle nous adjurait de porter afin que cesse le carnage…
A qui peut-on pour autant dire, sans être hué, que jamais nous n’avons vu cette Barbara dans la force de l’âge, dans la force de la scène, dans la clarté d’une interprétation audible, dans ces années fin soixante début soixante-dix, au plus fort de son inspiration, au meilleur de sa restitution ?
C’est cette période que Marie-Paule Belle nous rend dans une épure bienvenue et dans une interprétation qui lui est proche, pas forcément lointaine de l’originale. Mais différente. Avec sa propre voix, donc dans un registre vocal proche de celui de Barbara. Avec sans doute autant d’émotion, plus même car l’exercice est difficile, casse-gueule. C’est périlleux que de revisiter une icône, une forteresse réputée imprenable.
Ça donnerait envie de maintenant réinviter Marie-Paule Belle, que le public puisse ainsi connaître son œuvre en propre, qui a plus à voir avec l’émotion et la gravité de Barbara qu’avec ce cliché éculé, fatigué mais toujours vivant, d’une Parisienne que des radios fainéantes ont trop diffusé, occultant un répertoire de premier plan.
Site sur Marie-Paule Belle.
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