Pigalle : tant de choses à se dire…
Ce papier date un peu (février 1998 à Saint-Étienne) mais pas tant que ça en fait : même blindé de nouveaux titres, Pigalle, chaque fois qu’il se reconstitue, est pareil à lui-même qui, à l’image de François Hadji-Lazaro, marie instruments, publics, ambiances et émotions. Colères aussi…
Archive. Voici Pigalle et François Hadji-Lazaro, silhouette monobloc, violon et archet dans la main qui d’emblée dessinent d’inquiétantes ombres perçant le rond de lumière. Voici donc ce bonhomme qui, hors l’épate, va nous sortir au gré de ses chroniques chantées tous ses instruments, un panel de rêve qui allie cornemuse et banjo, vielle, guitare et violon… ici une bonne vingtaine d’instruments, sagement disposés sur un tourniquet. Exposés, toutes proportions gardées, comme dans un tarif-album de la Manufacture des armes et cycles dédié à d’autres et musicales portées.
Qu’Hadji-Lazaro n’en prenne pas ombrage, il apparaît en sorte de père moralisateur narrant l’existence, les joies et les coups durs, en tirant des enseignements à l’usage de son public, de ses fils et filles qui composent le parterre. Lazaro ne décrit que la vie, celle de tous les jours, pas forcément belle mais pas noire non plus, loin s’en faut. Réaliste, peuplée de personnages et de scènes à la limite du banal : quartiers de Paris, souvenirs émus, jours épuisés et instants de « grande patate. » Par l’évident amour qu’il lui porte, Hadji-Lazaro nous rend attachant son univers. Et nous de nous identifier et de vivre par procuration ses itinérances, ses rencontres, ses franches colères parfois. Contre le pape notamment, accusé sans détours de crime contre l’humanité : « Le pape a dit plastique tu ne mettras pas / Pendant ce temps roule roule sida. »
Six cents personnes connaissent ici leur Pigalle sur le bout des doigts, en attente de chaque titre, comptables de leurs souvenirs et de ce qu’en fera le groupe sur scène. Le concert prend ses aises dans le temps : il y a tant de choses à se dire… Hadji-Lazaro gratifie son public de longs, très longs rappels et, in fine, deux titres emblématiques de Pigalle : Sophie de Nantes et Dans la salle du bar-tabac de la rue des Martyrs, là où « il y a deux gars tatoués qui racontent leurs souvenirs. » Le père Lazaro nous conte les siens, les nôtres communs. Ses compagnons de scène assurent. « C’est top » diront les gens. La musique rock est forte, teintée de tous ses sons sortis d’autant d’instruments qu’on ne qualifiera plus jamais de ringards.
Repu, le concert achevé, chacun quitte les lieux, va rejoindre sa vie. On doit être stationnés à la première à gauche, là, juste après la rue des Martyrs.
Le myspace de Pigalle.
Merci Michel de nous inviter à nous imprégner une fois encore de la puissance décapante de cet Hadji-Lazaro et de ses compagnons. Ils seront à Nantes à la Bouche d’Air le 23 novembre, j’en suis toute ravie, ma place bien au chaud dans mon portefeuille… Et en première partie, le Magot de Mémé, petit frère local qui ne déparera pas le plateau ; à découvrir, du coup !