Le doigt sur Lacouture
Xavier Lacouture, 16 juillet 2010, Pittchoun théâtre à Avignon,
C’est un tout petit petit lieu comme il en existe beaucoup sur Avignon. Un dé à coudre, presque. Petite scène tout en rond, petits gradins en béton. Et des petits coussins rouges pour consoler nos gros séants maltraités. Dans le rond de lumière, Lacouture est en one-man-song, comme il dit. Un one-man un rien show, très chaud en cette fournaise, cette canicule festivalière. Le tour de chant, tour du rond, est calibré, millimétré : une heure cinq pas plus, d’autres attendent derrière. Au suivant… Lacouture, donc, qu’on dira en performance, qui arrive de derrière et déjà s’accordéonne, qui fait le beau, qui du reste n’est pas vilain et s’épate parfois lui-même, lui, le digne représentant de « la chanson confidentielle et underground ». Lacouture aime à dire qu’il fait dans la récupération et le recyclage : « L’art de la récupération est le plus vieux métier du monde ». Tant d’artistes le font sans le dire, à recycler les modes, à récupérer un peu de l’air du temps dans leur filtre à airs, leur piège à chansons, que ça n’étonnerait personne. Sauf que Lacouture ne fait pas comme les autres. Il sait pas. Lui n’est qu’instinct, drôle de bestiole qui s’anime sur sa piste. Lui, c’est le poids des mots qui s’entrechoquent, qui font son, qui font sens, équivoques parfois, lumineux souvent. Il lance les mots en jongleur du verbe. Et les récupère. Il les recycle, en alchimiste du mot : « Tout est dans la manière où le magicien dose ». Que récupère-t-il encore, ce chiffonnier de la chanson ? Un peu de tout. Pas mal de genres musicaux, slam inclus, ça fait un genre. Et Dieu, quitte à faire. Mais pour la bonne cause, celle de l’amouuuurrr : « Moi je n’ai Dieu que pour toi » Ça doit faire son effet devant la dulcinée. Même s’il chante aussi Défaisons l’amour…, histoire de commencer par la faim. Bien sûr il tente aussi de récupérer à son avantage le vocable en grâce dans le métier. Lui qui fait « de la chanson française, bien planté dans ses charentaises » rivalise d’anglicismes, lui le limite « borderline ». Lucide et loufoque, solide et farfelu, Lacouture est un modeste qui pourtant fanfaronne, sans tambours ni trompettes donc, mais au concertina et à l’ukulélé, à la scie aussi, fort de l’effet produit, fier de tous ses mots qu’il sait mettre en ordre de marche, avec qui il joue sans cesse, calembourant par ci, contrepétant par là. De la belle écriture vraiment qui ne recycle que son talent, comme cette pépite de chanson sur une terre qui va mal (Mal à la terre, d’ailleurs recyclé il y a quelques temps par sa consœur Zoé). Difficile de se lasser d’un tel bonhomme.
Le site de Xavier Lacouture, c’est juste là.
merci pour ton article, et pour tout le travail de fond que tu fais contre vents et marées.