Lacan en plaisirs solitaires
A quoi peut servir un festival s’il n’est pas, un peu, beaucoup, passionnément, de « découvertes » ? Et question découverte, Paroles et Musiques a fait mouche, hier, avec Chloé Lacan…
L’onanisme est-il ou non lacanien ? Manifestement oui. Utile précision, c’est de Chloé Lacan que nous parlons. Qu’on connaît pour avoir été, sous le pseudo de Monique Truchard, de La Crevette d’acier. Et désormais pratique en solo. Disons tout de go l’évident plaisir d’ainsi (re)découvrir cette chanteuse : ça vaut le coup et, ma foi, force le respect. De son entrée en fanfare en claquements de bouches et de doigts, en moult onomatopées (ça fait de suite silence sous le chapiteau de toile et de bois) à ces bucalises, jolies mises en bouche, auxquelles succèdent plein de belles et bonnes chansons, bien foutues, bien en chair, franches du collier, on ne peut plus directes, sans limite. L’accordéon au sein de sa chanson, branle-poumons bien calé sur ses seins, la chanteuse va sans retenue, aborde tous les registres et, mine de rien, fait petite anthologie, sinon de la chanson, au moins de ses genres. Elle vous suggère une chanson grésillante tirée d’un 78 tours aussi sûrement d’un Boris Vian (Fais-moi mal, Johnny) maillé des Noces de Figaro de Mozart. Car Lacan n’a pas de niche en propre dans la chanson : elle butine de plaisirs avec aisance, souvent impertinence, fronderie. Capable de trompetter de sa bouche, de toréer d’un geste, d’un rythme, de se la jouer diva. Et de l’être. Elle peut même, avec le doigté nécessaire, oser toute une chanson sur ce qui défrise la morale : « Oh, les plaisirs solitaires / Dans ma chambrette / J’ai l’art et la manière ». Du reste, jouant certes sur les mots, c’est ainsi qu’elle nomme ce récital, magnifique carte de visite s’il en est, qui positionne cet électron libre sur l’échiquier de la chanson, et dans nos désirs présents comme à venir. Son prime opus sort bientôt en bac : guettons-le. Si c’est comme sur scène, il redeviendra vite référence.
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