Corbier, tout pour être heureux !
Lyon, A Thou bout d’Chant, 4 décembre 2009,
Dès le premier titre, il nous balance son supposé passé, l’aventure de sa vie et la phrase qui tue : « Plus rien ne pouvait m’empêcher de faire l’andouille chez Dorothée ! » Car c’est bien lui qui, des années durant (je ne sais combien, ayant outrepassé l’âge et jeté ma télé), à suppléé parents et éducateurs défaillants dans l’éducation de nos gosses. On comprend mieux le monde dans lequel on vit à présent… Ceci dit, François Corbier est un type bien, en tous points recommandable. Et son one-man-show rare délice. Le premier qui dit le contraire ne l’a jamais vu, préférant les faciles et imbéciles présupposés.
Donc ce jovial barbu… Que les outrages du temps ont tant blanchi qu’il en ressemble à Mélaine Favennec : vieux barde aux longs tifs, longue barbe. Et aux souliers vernis. Vous m’en ferez sans doute reproche, mais j’ai entendu en Corbier un peu beaucoup de ce que j’aime en Brassens, belle construction et bon sens. L’art de Corbier emprunte tant à l’homme à la pipe qu’à Wally. Et dans le fond à Patrick Font : même impertinence, pareils refrains salvateurs. En moins grivois peut-être, et encore… Seul en scène, bardé de son Ovation, Corbier explore notre monde avec malice, radieux de ses audaces, de ses pirouettes. Il passe tout au crible, mitraille la connerie chaque fois qu’il peut, et les centrales nucléaires en priorité, sans doute pour la beauté du champignon qui s’ensuit et la fricassée qu’il en fera. C’est un obsédé du bien vivre, bon vivant épris de bonne chair. Un amoureux de l’amour, donc, qu’il célèbre en continu. Seul en scène, la salle ne se peuple pas moins de tout son petit monde, femmes aux seins machiavéliques, SDF ou chanteurs de l’ossuaire qui ne manquent pas de talent. Pas besoin de connaître ses chansons pour de suite les reprendre dans le talent qu’il nous donne et l’euphorie qu’il crée. « Bien sûr il y a les Russes, les Tchétchènes et la Chine / Les commandos-suicides, Israël Palestine / Pourtant y a tout pour être heureux / Dans la publicité nos dames ont des règles bleues » : Corbier alterne le drôle et le grave (oh, ce Jean-Jean, gamin-légume qui inspire une valse entre toutes déchirante…), et parfois fait les deux. L’est comme la vie le Corbier, aussi simple, aussi tordu. Et aussi indispensable.
Utile précision apportée par Corbier à la suite de la mise en ligne de ce papier : « Je n’emprunte rien à l’ami Wally… Je fais des chansons flash depuis 1966, date de mes débuts à l’Écluse (le genre « chanson flash » et le mot furent inventés par Claude Serra, le père du compositeur Éric Serra). J’ai fait l’Olympia avec ce répertoire de chansons ultra courtes en 1984. Et on a pu me voir au Caveau de la République, au Dom Camillo, à la Villa d’Estes, au Tire-Bouchon, au Port du Salut chanter des chansonnettes similaires jusqu’en 1987, date de mon entrée au Club Dorothée. Il se pourrait bien qu’à l’époque notre camarade Wally n’ait pas vu encore le jour… ».
Invitation à écouter librement le Micro-Entretien réalisé avec François Corbier à Randan au Salon La chanson des livres, le 6 avril 2014. DC.
LIEN : http://microentretiens.canalblog.com/archives/2014/04/24/29731857.html