La chanson, en général
C’était hier aux Oreilles en pointe, sur la scène du Quarto d’Unieux, port d’escale pour Général Alcazar, autre sétois de la chanson.
Épaules nues, muscles bandés, visage buriné, presque vitriolé, voici ce général-là. Qui est-il ? Est-ce un lointain voisin, un voyageur perdu, un revenant de guerre, un montreur de dentelles (1)… Étrange, dérangeant presque, cet individu, cet Alcazar, sorti des mémorables cases d’une bd ou héritier d’un général d’opérette, sur le vieux port… Comme pour dissiper la prime impression, il ne fait que se présenter. Oh, pas à entretenir une fiévreuse conversation avec le public, non. Mais à se chanter, dans une chanson presque parlée où le je mène abusivement le jeu. C’est lui, toujours lui, l’épicentre de ses mini-dramaturgies, qui oscillent sans doute entre le réel et la fiction, où rarement il en est un bel et romantique héros : « Quel idiot que je suis / quel idiot que j’étais / même mon cheval ne me supportais pas ». Patrick Chenière – c’est lui en général – à un je ne sais quoi de Léotard, en nettement plus distant, en volontaire retrait. Ses mots sont hachés et ce qu’il nous chante décalé, insolite, un rien foutraque d’un paradoxal ordonnancement. Rien de tel pour désorienter, déstabiliser un public. Mais il émane de ce type une aura, un mystère qui peut fasciner et vous indiquer le chemin dans les méandres de son art un rien torturé et tortueux. Vous « ménager les méninges » comme il dit.
(1) C’est moi qui emprunte Brel, pas lui.
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