Les alexandrins de Polo
Pour son entrée en chanson, en fin des années quatre-vingt, il s’était mis en Satellites, sans doute pour mieux rêver des constellations du showbiz. Le groupe alternatif explosa un beau jour en plein ciel. Redescente sur terre pour Pierre « Polo » Lamy, mais avec encore dans la tête des myriades d’étoiles, de celles qui, lente alchimie, s’agencent en pure poésie. Polo le rockeur s’est mué en chanteur. Qui plus est rêveur, contemplant des petites choses, de banales scènes du quotidien pour en tirer d’admirables chansons. Pas de ces grands titres qui cartonnent dans les hit, non. Mais mieux. De ces chansons qu’on entend par hasard, et nous surprennent, nous entêtent. Qu’on se met à simplement écouter, pour vivre trois, quatre minutes, de pur enchantement. La voix de Polo est naturellement chantante, d’une rare fraîcheur. On associe souvent le nom de Trenet à l’art de Polo et ce n’est pas faux. De petits riens, des bouts de rimes, le soleil du midi, des grillons, le vent dans les arbres, une baraque à frites, l’amitié… La chanson de Polo est faite de simplicité, de belle écriture d’une jolie fluidité. Après Portes dorées en 2005, Polo semble remettre les mêmes couverts sur une identique nappe. Même inspiration, même préciosité, on ne s’en plaindra pas. La différence est que Polo a mis ses mots dans le doux carcan de l’alexandrin, de l’octosyllabe, des vers mêlés… Ce sont tantôt des odes, des cantiques, des rondeaux ou des poèmes épiques, des fantaisies et ritournelles, des ballades aux règles précises, comme on canalise un flux pour mieux encore en dessiner les courbes et autres arabesques. Ce nouvel opus, Alexandres (chez Atmosphériques), est à nouveau un rare plaisir non d’esthète mais d’artisan du verbe pas peu fier de maintenant savoir utiliser les gouges avec lesquels il sculpte mieux encore ses mots, il cisèle ses émotions. Cette galette est, à nouveau, un petit bijou !
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