Paccoud, superbe graine d’ananar
Ce fut ma première rencontre avec Christian Paccoud, lors du festival Y’a d’la chanson dans l’air au Théâtre de Poche à Saint-Étienne. C’était en 2003. Les premières fois actent souvent la naissance d’amitiés vraies. Et de total respect. Après vingt-cinq ans de chanson, rétif à tout enregistrement, Paccoud venait tout juste de sortir ses deux premiers CD. Mais c’est en scène qu’il vous faut le découvrir…
Archive. Rarement on aura autant approché l’idée de la chanson populaire : celle qui parle du peule, qui parle au peuple, qui prend aux tripes, dont on reprend et mémorise sur l’instant chaque refrain. De ceux qui nous portent, nous galvanisent. Christian Paccoud est choc rare, unique, qui bouscule ce qu’on croyait savoir sur la chanson, toutes nos belles hiérarchies si longtemps travaillées. C’est enivrant, impressionnant ! Sans souffle et sans répit, il colle ses chansons les unes aux autres comme si elles n’en faisaient plus qu’une, de bien plus d’une heure, sans trêve, sans possible place aux applaudissements. En une sorte de chronique chantée d’un peuple qui doute mais qui lutte, qui peine à souffler les braises de la révolution. Qui fermente et chante, réanimant toute vie par la chanson. Pas de micro, lui n’en a pas besoin pour hurler son chant, celui des réprouvés de la vie, ceux qui trouvent chauffage dans les cages d’escalier : « Crache le feu, l’amour et dis ton nom / Qu’on l’entende avenue du Dragon » Que d’l’amour, que DAL ! Au son de son piano du pauvre, le chanteur, vraie graine d’ananar, défile, manifeste, tangote, virevolte… « Anarchie, ma vieille / T’es comme le soleil / Toute la vie on t’attend ! ». Paccoud est un poing dans la gueule, un choc, un crachat dans la soupe. Vous ne le connaissiez pas, nous non plus. Vingt-cinq ans qu’il chante et il nous était encore vierge d’écoute. Jean Ferrat, invité il y a peu sur France2, s’est permis d’y imposer trois artistes : Solleville, Joyet et Paccoud. On comprend pourquoi. Que ce chanteur nous revienne d’urgence : il est de la race des géants, des seigneurs, du peuple. Par lui le Poche vient de nous offrir l’une de nos plus mémorables émotions en chanson.
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