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Johnny, c’est fini

Ouvrir un blog en se faisant les dents sur un timbre de Johnny augure bien du reste… Restons quand même un instant sur l’aqueu chanteur. Je suis sur Saint-Étienne, mon territoire de chasse, là où j’épie la chanson quand elle passe. Il y a peu, juste avant de se faire pararazzier à Cannes lors du festival, Johnny est venu faire résidence à Sainté, oui oui. Comprenez que son mentor, patron et manager, Jean-Claude Camus, est plus ou moins le « gestionnaire » de notre Zénith flambant neuf, paraît-il le plus beau de France, au moins jusqu’au prochain. Alors Johnny est venu y roder sa tournée des stades, celle qui ira bien plus loin que les stades, sa tournée d’adieu qui n’en finit pas de surajouter des dates et d’améliorer quelques comptes en banque, histoire de voir venir. Johnny pour sept dates stéphanoises, quarante-cinq mille spectateurs en tout (plus la répét publique offerte aux lycéens, beau justificatif social soit-dit en passant). De tout d’ailleurs, le folklore Hallyday, gros bras (pas tous d’ailleurs) et gros bœufs. Et pis toutes les couches de la société, histoire d’un soir côtoyer, tutoyer l’idole, histoire de s’encanailler dans le « phénomène culturel » qu’il est, de tenter d’y comprendre quelque chose. Faut avoir vu. De fait, tout le monde est allé voir, à soixante euros dans la fosse et plus, bien plus, derrière. La presse locale c’est La Tribune-Le Progrès. Jadis j’y étais, à chroniquer les concerts justement, à toujours privilégier les plus petits du reste. Jadis donc, cette presse, sans nullement être folle du « culturel » (rien que le mot…), laissait un peu de place à cette expression. Mais c’est fini. On fait people, on fait télé, on fait potins et c’est tout. Le chanteur qui passe dans le coin n’a plus aucune chance d’être relaté dans ce journal : pas la place, jamais la place ! De toutes façons, c’est pas ce que le lectorat attend. Il veut du foot (ces verts qui passent au rouge…), des chiens écrasés et du people, à ce qu’on dit. Vient le miracle Johnny, celui qui démultiplie les pains et les poissons. Et le tirage sans doute. La Tribune-Le Progrès se redécouvre une vocation culturelle. Et une « Une » ras jusqu’à la gueule de l’idole. Et une autre, et une autre encore, plus une… Et des pages pleines quadri qu’on offre à l’artiste. Analyse de l’œuvre, sociologie de la chanson ? que nenni ! Du futile, du chiffre destiné à épater la galerie, du portrait de fan, du clinquant, du bling-bling. Et du Camus (pas le romancier non, le business-man d’Hallyday) à chaque page, qui se permet même, de sa hauteur, de fustiger ces salles « publiques » qui ont l’outrecuidance de ne pas prendre ses poulains, ses artistes en catalogue, son Grégoire en vogue. On n’offense pas Camus, on achète ce qu’il prescrit. Et la presse fait ce qu’elle estime être désormais son métier, imprimant sans réserve, sans nuance, sans commentaire. Cette presse locale qui imprimera du Johnny jusqu’à la nausée, se prosternant, se vautrant dedans. Sans jamais avoir toutefois la moindre interview, le moindre petit mot de l’artiste. Faire autant de pages avec rien, autant de bruit pour rien. Être servile à ce point et ne rien obtenir, pas la plus petite exclusivité du reste réservée à plus grand qu’elle, aux médias audiovisuels dominants. Piteuse récolte. J’aimerai pas être journaliste « culturel » en ce canard. Etre amené un jour, en baissant la tête, en y rasant les murs, à de nouveau rentrer dans une salle de spectacle pour y faire mon métier. – Que faisiez-vous aux temps chauds ?Nuit et jour à tout venant je célébrais Hallyday, ne vous déplaise.Vous le célébriez ? J’en suis fort aise, eh bien dansez maintenant !

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