Georges Brassens « Les Quat’z'arts »
La boîte à dominos enfouie sous les fleurs
Tout le monde équipé de sa tenue de deuil
La farce était bien bonne et valait le coup d’œil
L’enterrement paraissait officiel. Bravo!
Il prenait son trépas à cœur, cette fois-ci
Et les bonshomm’s chargés de la levée du corps
Ne chantaient pas non plus « Saint-Eloi bande encor ! »
Georges Brassens
Paroles et Musique Georges Brassens. Extrait de l’album « Les copains d’abord » 1964
Georges Brassens a écrit de nombreuses chansons sur la mort, la traitant avec dérision, la dédramatisant ou la conjurant. Écoutez ce qu’il en dit en 1972, en parlant de son parcours (avec en bonus Le blason).
Dans celle-ci, il invoque la manière dont Les Quat’z'arts (Étudiants aux Beaux-Arts, Internes en médecine (Carabins) et autres écrivains, artistes) finissaient leur grand bal printanier par une parodie d’enterrement, destinée à conjurer la mort en s’en moquant – Les étudiants des beaux-arts étudiant l’anatomie sur des cadavres tout comme les étudiants en médecine. Dès la fin du XIXeme siècle et jusqu’en 1966, ce bal consistait en une grande fête tenant à la fois du carnaval, du bizutage et de la chanson de corps de garde, un défouloir où tout était permis, quitte à provoquer quelques scandales.
La chanson toutefois sous son côté moqueur laisse apparaître les premiers deuils de Georges Brassens, qui avait perdu sa mère en 1962 (son père ne tardera pas à la rejoindre en 1965). Et c’est bien de cette prise de conscience que le mort, cette fois-ci, ne se relèvera pas après la parodie, en « lev[ant] le couvercle en s’écriant « Coucou ! », dont il est question ici. Il la chante ici à Bobino en 1969, au moment où famille et amis commencent à le quitter.
Après avoir chanté « Trompe la mort » ou « Les funérailles d’antan », Brassens fut rattrapé par la camarde le 29 octobre 1981, bien trop tôt à 60 ans, pour notre plus grand déplaisir et sans doute le sien, et ne fut pas enterré à la plage de Sète. Pourtant sur sa tombe modeste d‘éternel estivant, « Les bons amis [viennent toujours] faire sur [s]a concession / D’affectueuses révérences ». Et le chantent encore plus et sur tous les tons, car comme le disait son modèle Charles Trénet, « longtemps / Après que les poètes ont disparu / Leurs chansons courent encore dans les rues ».
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