La boîte à images du Cirque des Mirages
Plus de 20 ans d’existence et seulement leur 4ème album (leur précédent opus remonte à 2009, déjà) : on ne peut pas dire que le Cirque des Mirages encombre les rares étals des marchands de disques !
Le duo Parker et Yanowki, c’est par la scène qu’il a acquis sa flatteuse réputation. Il est vrai que les spectacles qu’il propose ne ressemblent qu’à eux-mêmes. Un univers unique dans le petit monde de la chanson française. Fait de théâtralité, de grandiloquence, de littérature et de rythmes infernaux. Des concerts qui empruntent autant à l’expressionnisme allemand qu’à la chanson du début du siècle (le XXème !), où la gestuelle précise et la diction parfaite du dégingandé Yanowski épate le chaland, déjà passablement étourdi par les compositions de Fred Parker, roi du swing et du piano, tant classique que bastringue.
La gourmandise est donc de mise au moment de découvrir cette nouvelle galette. Elle porte comme nom Boîte de Pandore, évoquant le fameux coffret mythologique dont se sont échappés tous les maux de la Terre, hormis l’espoir. L’album débute logiquement par le titre Ouverture de la boîte et se clôt, tout aussi logiquement, par Fermeture de la boîte. Deux morceaux déclamés sur fond musical sobre et délicat, avec l’emphase coutumière du chanteur. Le contenu du récipient en question ? Huit chansons pour une galerie de personnages étranges, inquiétants, tourmentés. Une suite de courtes nouvelles flirtant avec le fantastique, de saynètes noires d’ébène, emplies de désirs inassouvis et de rêves fracassés. De la chanson narrative comme on n’en fait plus. Mais n’est-ce pas le propre du Cirque des Mirages que de se situer hors des modes et du temps ?
Découvrons dès lors la sombre histoire d’un homme supplanté par son reflet ou d’un interrogatoire de police musclé et vain, savourons un rêve faustien de gloire et de paillettes, goûtons au portrait de l’angoissant propriétaire d’une mystérieuse maison, rions des tribulations d’un amateur de petites annonces… Ajoutons-y le destin tragique d’un certain Teddy Johnson, au sort semblable à celui du Monsieur William chanté jadis par Léo Ferré, et une évocation malicieuse de l’ancestrale maladie de la peste et des masques nécessaires pour s’en préserver. Achevons le périple enfin sur une note plus joyeuse, en allant guincher dans un wonderfull cabaret.
La patte de l’auteur Yanowski se reconnaît immédiatement, à mi-chemin de la noirceur littéraire du Guidoni des débuts et de la fantaisie macabre d’une Juliette. La mise en ondes de ces mots d’orfèvre n’est pas en reste, Fred Parker ayant multiplié les ambiances musicales et bénéficié de moyens à la hauteur de ses ambitions : ça swingue, ça rocke-guitare, ça quatuore à cordes, ça s’offre même le luxe d’un grandiose Big Band. Sans oublier les invités prestigieux, comme Arthur H et Guillaume Farley.
En tant qu’album, cette Boîte de Pandore est une source de plaisirs variés, à même de contenter l’esprit et l’oreille. Tout en effets, le chant de Yanowski suscite cependant tant d’images dans l’esprit de l’auditeur qu’il nous tarde de pouvoir en apprécier la transposition scénique. Nul doute que le bonheur sera alors complet.
Le Cirque des Mirages, Boîte de Pandore, BLY Music Group, 2022.
La page facebook du Cirque des Mirages, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de Yanowski et du Cirque des mirages, c’est là. Et ici.
La vente aux enchères à France Inter le 14 octobre 2022, de l’album précédent Delusion Club :
La garde à vue, avec Guillaume Farley, audio
La porte de l’inconnu, avec Arthur H, audio
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