Les Wriggles : le drapeau rouge flotte au-dessus du barbecue
8 octobre 2022, Théâtre du Forum à Feurs (42),
A leur naissance, ils furent quintuplés. Puis, un beau jour, trio. Après long sommeil, ils nous revinrent en quintet, puis en quatuor. C’est ainsi qu’ils arpentent à présent les scènes, les enchantent comme c’est pas possible. Applaudir Les Wriggles est forcément un cadeau. Que ceux qui, par ignorance ou par stupidité, décrètent la chanson défunte ou sans grand intérêt, aillent voir Les Wriggles : ils se réconcilieront sur l’instant. Bienveillant, je vous livre mon axiome du jour : Les Wriggles sont une pièce importante, constitutive même, de la pharmacopée de la chanson (et de nos bobos de l’âme).
On parle souvent, de plus en plus, de mise en scène, à propos de spectacles de chanson. Le terme de mise en espace me semble plus modeste et beaucoup plus juste. Sauf avec eux. Chaque chanson est tableau en soi (c’est dire que lorsque qu’ils chantent Sixtine, un truc fait rien que de grands peintres et de toiles, ça fait presque mise en abîme : « Elle est Diego, je suis Frida / Et je l’aime sans sourciller / Mais elle me voit comme un Seurat / Et me regarde en pointillé… »), avec un vrai travail d’acteurs (qu’ils sont aussi). Avec, ma foi, beaucoup plus d’accessoires qu’ils n’en avaient dans un lointain passé (en fait, ils n’avaient rien, leur budget était déjà dans le rouge). L’inflation est telle qu’à l’unique guitare qu’ils se refilaient de main en main jadis, ils ont substitué pas moins de quatre guitares et un ukulélé : parfois presque un grand orchestre.
Très peu de chansons tirées de leur mythe, leur répertoire de légende : seules Poupine et Thierry, puis Julie la petite Olive en rappel, sous un tonnerre d’applaudissements. Car, depuis leur retour, Les Wriggles sont à la hauteur de plein d’autres titres (trente-trois en trois albums, le dernier sort dans quelques jours) et c’est du bon. Avec ce délicieux et délicat Nos Lèvres sont à vendre qui pourrait cartonner sur la FM si les radios n’étaient pas à ce point fermées au pur talent.
A chaque chanson, presque un nouveau clip sur scène, en vrai, devant nous, comme celui qui ouvre le ban, le Barbeuc party, avec épaisse fumée de rigueur : en résumé, des bœufs de beaufs face au réchauffement climatique.
Notre quatuor alterne l’intime et les grands causes et multiplient les combinaisons : solo, duo, trio ou à quatre. Avec, ici et là, des chansons qui résonnent, percutent plus encore, paradoxalement dans la douceur qui doit leur être préférable pour chanter la misère et la solitude. Ainsi la bouleversante Je vis toute seule avec un chien : « Je vis toute seule avec un chien / Qui m’accuse d’aimer d’autres chiens / Qui grogne sur ceux qui me matent / Alors que c’est bien lui qui va / Renifler des culs à tout va » (l’écriture d’Emmanuel Urbanet, transfuge des Joyeux Urbains, est saisissante).
Souvent remarquée, la mise en scène ne serait rien sans le travail d’éclairage, remarquable, quasi cinématographique. Et celui sur les voix, derrière lequel on sait la patte du fidèle Michel Puyau, l’un des Chanson plus Bifluorée.
Une fois de plus, ne comptez pas sur moi pour vous refaire le concert, détailler chaque titre, ce serait vain (en plus y en a trop, notre quatuor étant des plus généreux). Juste pour vous dire que Les Wriggles sont revenus à leur plus haut niveau, qu’il vous faut les voir si toutefois vous prétendez aimer la chanson. Qu’à défaut vous avez leurs CD : que le petit dernier, Quatre étoiles (dont tous les titres ou presque sont repris dans l’actuel spectacle) sort le 14 octobre, et qu’il en vaut bien cinq (étoiles !).
Longue vie aux Wriggles !
Le facebook des Wriggles, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’eux, c’est là. Le CD Quatre Etoiles sort chez Blue Line records/[Integral].
Quant à l’organisateur de Feurs, Scènes en Forez, qu’il nous faut saluer, il nous programme bientôt Alan Stivell (le 26 novembre), Reno Bistan (le 25 février) et Leila Huissoud (le jour du poisson, en début avril). Feurs, c’est pas loin, c’est proche de tout : allez- y !
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