Yvan Marc, mais pas tout seul
Sauvé dans Lancer de disque, Robert Migliorini
Tags: Alexis HK, Amélie-les-Crayons, Buridane, Emilie Marsh, Fabien Martin, Féloche, Frédéric Bobin, Jil Caplan, Les Ogres de Barback, Nouvelles, Ours, Yvan Marc, Yves Jamait
Yvan Marc fut à ses débuts signé chez Virgin. Imaginons qu’il le soit resté : ce disque de reprises en duos n’aurait forcément pas la même gueule, le personnel en serait différent. Ce ne seraient que des stars d’hier, d’aujourd’hui et de demain, des gens dont le domicile principal est dans le poste de télé ou chez Manoukian. Il y aurait peut-être des titres mieux interprétés que d’autres, mais ce disque de plus, ce presque tribute, n’aurait que bien peu d’intérêt.
De Buridane à Alexis HK, d’Ours à Amélie les crayons, d’Yves Jamait aux Ogres de Barback, d’Emilie Marsh à Jil Caplan, de Fabien Martin à Féloche ou Frédéric Bobin, voici une distribution remarquable, choisie, volontaire. En phase avec l’artiste et le propos. Et le résultat est là : un disque que vous passez en boucle tellement c’est bien.
Comment vous dire ? Chaque titre est ici trésor partagé : c’est manifestement du Yvan Marc dans ses thématiques, ses préoccupations récurrentes, dans sa voix. Et c’est aussi la voix de l’autre, l’invité, qui rentre vraiment dans le texte, l’habite, le fait sien et laisse son empreinte. Et d’abord et avant tout son timbre. Premier titre, Nos vies d’ours. Tiens, un duo avec Souchon ! C’est bien lui, avec son inimitable façon de posséder les mots sans avoir l’air d’y toucher. C’est lui, sorti de sa tanière : c’est Ours.
On n’élira pas un titre, un duo, sur un autre : ce n’est ni l’objet ni l’esprit de tels partages.
C’est le dixième album, dont huit originaux, d’Yvan Marc. Il n’y a pas trace ici de ses quatre premiers disques : seules figurent celles du « retour à son indépendance » après les vicissitudes du showbiz. Lui qu’on s’imaginait solitaire, effectivement un peu ours, terré dans le Maygal, en Haute-Loire, s’adjoint ici (s’associe à) la crème de la chanson (pile dans le cœur qui bat de NosEnchanteurs), comme s’il entrait enfin dans ce cercle auquel il pouvait prétendre depuis longtemps. Fasse que cet album « pas tout seul » soit sa carte d’entrée, son passe, pour de plus larges et passionnantes programmations.
Yvan Marc, Pas tout seul, Labeldiff43/InOuïe distribution 2021. Sortie le 18 juin 2021. Le site d’Yvan Marc, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.
Yvan Marc, comme dirait Cabrel, quelqu’un de l’intérieur
Entretien avec Yvan Marc, par Robert Migliorini
Vous sortez cette semaine cet album de duos. C’est pour se placer dans l’air du temps ?
Yvan Marc : C’était le bon moment de concrétiser cette envie d’être en bonne compagnie et de revisiter mes chansons récentes tirées des derniers albums. Et comme j’ai obtenu très vite l’accord des autres artistes contactés, je n’ai pas hésité. Je suis finalement connu dans le milieu (rire). Peut-être aussi que c’était ma manière de sortir d’un long confinement où nous étions face à l’inconnu pour la suite, notamment pour le monde du spectacle vivant. J’ai choisi, par ailleurs, de vivre loin de Paris, au cœur de la nature. Les thèmes abordés dans mes chansons ont dû correspondre aux attentes des uns et des autres. Je résumerai cela comme le goût pour un travail d’artisan.
C’est aussi comme un air de famille entre vous toutes et tous en les réunissant sur le même disque ?
Finalement oui. Les affinités se dégagent de ces titres dont certains ont été réorchestrés pour l’occasion. Réunis sous le même toit, nous traduisons notre souci de l’avenir de la planète. Grace aux moyens techniques actuels nous avons pu travailler à distance. J’ai proposé un choix de deux chansons. Même si pour le chanteur Ours (Charles Souchon) un titre s’imposait d’emblée : Nos vies d’ours (rire). J’avais vu en concerts nombre de mes invités. Sauf les Ogres de Barback, mes voisins d’Ardèche. C’est à la fratrie que j’ai proposé d’emblée un de mes titres plus engagé socialement : Les grilles fermées. En réécoutant le résultat, je redécouvre mes propres chansons !
De quand date votre choix du format chanson ?
Dès mes débuts. A l’âge de douze ans. Il y a quand même quarante ans ! Avec une option d’emblée pour l’univers du folk, au sens large. Dans le sillage d’un Francis Cabrel. Celui qui se présente comme un « homme de l’intérieur ». Ce qui me correspond tout à fait. Et puis c’est Michaël Furnon, de Mickey 3 D, qui m’a invité à passer à un stade professionnel. Nous sommes du même village. Nous connaissons le même studio d’enregistrement à Écotay-l’Olme (Loire), le studio E. Je travaille depuis mes débuts avec Pascal Colomb, par ailleurs compositeur pour Françoise Hardy ou Vanessa Paradis entre autres. J’ai fait ses premières parties et suis parti en tournée avec lui. Je me souviens encore d’un concert exceptionnel à La Cigale à Paris en 2003. C’est l’année de mon premier album, La cuisine, qui offre des chansons humoristiques à leur façon. J’ai signé ensuite dans un label national. Aujourd’hui je sors mes disques en autoproduction.
Sans abandonner votre mi-temps de professeur d’éducation socio-culturelle en lycée agricole de Haute-Loire ?
Il reste un lien entre la musique et mon métier de professeur. J’ai lancé en 2016 un festival musical itinérant, Le Chant des Sucs, où j’embauche certains de mes élèves au sein du lycée agricole d’Yssingeaux. Nous préparons la sixième édition qui devrait se tenir de la mi septembre à la mi octobre. Ces jeunes ne sont pas rebutés par la chanson française. Au contraire. Ils aiment rencontrer les artistes, dont certains sont débutants. Et j’ai enregistré, en condition professionnelle, six albums studio avec des chansons composées par ces élèves.
Pas tout seul marque une étape ?
Peut-être ! Je prépare l’album suivant. Avec des envies d’électro, de nouveaux sons. Qui sait ? Je ne me décourage jamais et je donne rendez-vous au public tous les deux ans. C’est le temps qu’il me faut pour bénéficier de l’espace et du temps qui est le mien. Et d’inviter la culture où elle ne serait pas encore.
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