Monsieur Gontrand, dans une séduisante épure

Monsieur Gontrand

Comme pourrait le chanter Leprest, « Tout dans l’chapeau !* ». Encore un chanteur à couvre-chef, Frasiak et Christian Olivier ne sont pas seuls à le porter. Lui, c’est Monsieur Gontrand (son vrai nom c’est Christian Braut), un artiste des Yvelines dont, finalement, on ne sait pas grand-chose, si ce n’est – et ce n’est pas rien – que ce présent opus est son sixième, que le premier remonte à il y a vingt ans. « Les biographies sont un exercice de style pour lequel je n’ai jamais été très doué » se défend le chanteur. Qui s’est visiblement fait plaisir : ce sixième disque est un double 33 tours. « Il y a des personnes qui adorent avoir les vinyles, même s’ils n’ont pas de platines. C’est un bel objet », sourit l’artiste. Alors, comment l’écouter ? Un lien permet de télécharger la version mp3. La lecture des textes sur le livret au format vinyle en est facilitée : les ophtalmos lui en seront gré.

Autre surprise, presque une énigme, est le titre de l’album, un rien incongrue pour les non-initiés, les non-musiciens : 76 à la noire. « Toute chanson a un tempo. Je me suis rendu compte, en écrivant la grille d’accords, que la majorité de mes chansons étaient sur ce tempo : 76 à la noire. J’ai trouvé cela amusant. »

(pour commander l’album, cliquez sur la pochette)

Le grand luxe d’un vinyle, appellerait, quitte à faire, celui de l’orchestration, d’une débauche de musiciens. Là, non, c’est même l’inverse. Dix-neuf titres (tous inédits, sauf la reprise de Elle a les yeux revolver, de Marc Lavoine) enchâssés dans la séduisante épure d’un piano-voix où l’artiste est mis à nu, sans effets à quoi se raccrocher. Voix fragile, qu’on s’imagine tutoyer en sœur la nicotine, tant qu’elle est ici émouvante d’autant plus qu’elle explore l’intime, la mélancolie. Ici il dévoile le petit nom des maisons du bord de mer, là il fait la cour et déclare son amour. Ce sont des tranches de vies, des approches, des ruptures, des manques, douloureuses absences. « Ce soir j’ai fait mes bagages / J’ai mis sans dessus dessous / Tous les souvenirs de nous / Ce sir je pars en voyage… » Ce sont des chansons d’impressions, d’émotions, même parfois de ces banalités additionnées qui ont grande importance, parsèment une vie : « Mêmes scènes, mêmes décors / Une vie s’éveille, une vie s’endort / Mêmes répliques, mêmes dialogues / Des préfaces aux épilogues ». Des plans fixes, des gens qui passent, qui s’aiment, qui dansent, le temps – parfois cruel – qui se déroule… C’est un disque délicieusement contemplatif, d’un rythme lent au sens d’une caméra qui balaie lentement l’espace, prenant le temps d’observer tant l’action que les sentiments, les décors, les ambiances, les lieux du passé comme du présent, les restituer finement : jolis travellings pour très bel album.

Monsieur Gontrand, 76 à la noire, Archipel studios 2020. Le facebook de Monsieur Gontrand, c’est ici. Contact : monsieur@gontrand.fr

* « Tout dans l’chapeau » paroles Allain Leprest, musique Christopher Murray – inédit discographique

« 20 ans en 2020″ :

teaser de cet album :