Maxime Le Forestier, toujours là, jamais las
70 berges au compteur, 50 ans de carrière, quelques classiques à son tableau d’honneur (Mon frère, San Francisco…) et pourtant toujours sur la brèche, voici donc Maxime Le Forestier de retour sur nos platines – et bientôt sur scène – avec son seizième album studio, Paraître ou ne pas être.
Le titre malicieux du disque le définit bien. En sage de la chanson française qu’il est devenu, Maxime nous offre une palette de nouveaux titres, poétiques et intimes, sarcastiques ou à consonance sociale, où la gravité du fond n’est en rien occultée par la légèreté de la forme. « Si on se plaît à paraître / On fait des duplicatas / Alors on finit par être / Une image et rien que ça / Si on veut seulement être / On n’existe que pour soi / On oublie la boite à lettres / Des lettres on n’en reçoit pas. »
Au chapitre des chansons sociétales figure bien évidemment le morceau qu’il nous avait offert en avril 2017, juste avant les élections présidentielles, La vieille dame, portrait incisif d’une France craintive et repliée sur elle-même, en proie au doute et tentée de s’offrir au pire (Aujourd’hui, morose / Ankylose / Elle veut plus changer les choses / Elle a peur / On dirait une vieille dame). On y ajoutera Les ronds dans l’air, constat lucide sur l’impossible oubli numérique (Les paroles / Ne s’envolent / Plus, dommage / Sitôt prononcées / Elles restent coincées / Dans un nuage), ou ce Ça déborde écologique aux allures de sonnette d’alarme (Et tout ça s’accumule / Ça s’entasse / Et ça prend toute la place / Ça va déborder, ça déborde).
On pourra préférer les morceaux plus intimes, où le chanteur dresse le bilan de l’existence (Va savoir quand elle nous quitte / L’insouciance / Va trouver la date limite / De l’enfance) ou croque à pleine dents les plaisirs de la vie (Tous les soleils d’avant l’hiver / Je vais les regarder en face / En me disant on sait jamais / Si c’était le dernier). A moins qu’il ne se souvienne avec émotion de sa première guitare (De toutes celles que j’ai vues, c’était pas la plus belle / Mais c’est elle qui m’a plu, j’suis sorti avec elle) ou ne s’interroge sur le goût des filles, qui parfois tombent amoureuses de n’importe qui…
Point final de l’album : un superbe Mon ruisseau, paroles et musique de l’ami Philippe Lafontaine, que Maxime interprète en duo avec son fils Arthur. Une chanson qui file comme une eau vive, comme cette vie insaisissable qui s’obstine à nous filer entre les doigts (Toute ma vie j’ai suivi le méandre / Qu’inconstant dessinait mon ruisseau) mais qui laisse en fin de compte de si belles traces chez ceux qu’on a aimés (Du maquis que la rosée parfume / Tout mon pré reboit dans mon ruisseau / A l’heure où l’automne emporte mes brumes / Haut haut haut).
Au total, 10 courtes chansons (le disque dure à peine 30 minutes), qui ne rajoutent peut-être rien à la gloire de leur auteur, mais qui ne déparent certainement pas son répertoire. Un album artisanal, composé en partie par des fidèles de Maxime (Julien Clerc, Manu Galvin, Arthur le Forestier ou le pianiste de jazz Baptiste Trotignon), aux arrangements mettant les guitares en avant, appuyées par des percussions discrètes, un soupçon de violon, une rasade de piano, une volée de chœurs. Un album de folk intemporel, qui mêle arrangements traditionnels et propos contemporain. Un album qui fait du bien, qui se pose, qui nous invite à la sérénité et à la distance. Un album de Maxime tel qu’on l’aime, quoi !
Maxime Le Forestier, Paraître ou ne pas être, Polydor 2019.
Le site de Maxime le Forestier, c’est ici. Ce que NosEnchanteurs en a déjà dit, là.
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