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Laurent Montagne, s’en souvenir

Laurent Montagne à La Manufacture Chanson (photo Jean-Philippe Rimbaud)

Laurent Montagne à La Manufacture Chanson (photo Jean-Philippe Rimbaud)

29 mars 2019, ACP La Manufacture Chanson, Paris,

 

Un vendredi soir à Paris, comme tous les soirs d’ailleurs. Le choix ne manque pas pour celui ou celle qui veut “sortir”. Il y’a les resto en amoureux, le bar avec les copains, la séance de cinéma ou un bon concert. Pour celles et ceux qui auront choisi l’option “concert” (bon ou moins bon, il en faut pour tous les les goûts), là aussi le choix ne manque pas. Il suffit de ne pas se manquer soi-même et de faire le bon choix. Ce vendredi soir, il y a entre autres Thérapie Taxis à l’Olympia, Cœur de Pirate à Pleyel et Keen’V à  l’Élysée Montmartre. Devant de telles propositions la tentation est grande de rester à la maison pour revoir en Dvd Sans toit ni loi ou n’importe lequel des films d’Agnès Varda qui la rendent immortelle.

LAURENT MONTAGNE : INDOLENT, FRONDEUR ET AFFABLE Les musicologues se disputeront l’exact terme qu’il convient d’employer pour qualifier ce nouvel album, comptons sur eux pour qu’ils en fassent encore des montagnes. Rock, pop ou chanson ? En fait, les trois ! Et les amateurs de chacun de ces genres y trouveront leur compte, leur plaisir, au moins à l’écoute de l’album et dans de bonnes conditions, car parfois la musique gagne sur les paroles. Ce ne seraient que simples et futiles mots que ça ne gênerait pas, mais c’est du Montagne, une fine plume, une voix douce à la charge mélodique, et il convient de n’en rien louper. Car ce n’est pas rien, loin s’en faut. Si la parole de Laurent Montagne est rare (son dernier album remonte à il y a six ans), son habileté d’écriture est la même, dans laquelle se nichent, se développent des idées fortes, des résolutions, des engagements. Ainsi Il pleut, à ma connaissance une des premières chansons résolument ainsi qui vous savez : « Mauvais apôtre ou Bonaparte / Bientôt ton Waterloo / Prends la fuite, mais prends-la vite / La foule franchit ta porte / Toi tu dis qu’il pleut / Mais tu nous pisse dessus / Ta fin est proche ». Car, sous la douceur de mots polis, travaillés, la plume de Laurent Montagne devient lame, devient lave, indocile, petits cailloux dans les pompes funèbres des gens de pouvoir, grain de sable dans l’engrenage du système : « Le système t’aime / Comme un vampire aime le sang / Qui coule au fond de tes veines ». C’est d’ailleurs ça, Montagne : d’un côté focale large, plan fixe sur un paysage, loin de tout, comme un tableau que juste caresse le vent, hors des tumultes de ce monde ; de l’autre, caméra à l’épaule, dans la mêlée politique et sociale, la lutte des individus. Dehors et dedans. Et l’amour en plus, pour lequel il trouve encore des facettes nouvelles, d’autres éclairages, d’autres émotions : « Je trace à la plume / Les lignes de ton corps / Sous la lune en décor / Ton point de fuite en point de mire / Entre mes doigts / Te laisser devenir… » Si la base musicale de ce très bel opus est électrique (guitares, basses, clavier, batterie), le savoureux éclectisme vient sur deux titres (La rumeur, Marguerite) avec le renfort du Trio Zéphyr (alto, violoncelle et violon) : délicieux !  Retenons ce que Montagne tient pour être Chanson : « Je te fais indolente / Frondeuse ou affable / Une douce caresse / Un boulet de canon / Ni maître, ni esclave / Dans la gueule des puissants / T’es belle mais pas mouton / Non, t’es juste une chanson ». A une telle définition, on ne peut que souscrire, qu’applaudir des deux mains, dès demain, aujourd’hui. MICHE KEMPER Laurent Montagne, Souviens-moi, autoproduit/Inouïe Distribution 2019.

LAURENT MONTAGNE : INDOLENT ET FRONDEUR
Les musicologues se disputeront l’exact terme qu’il convient d’employer pour qualifier ce nouvel album, comptons sur eux pour qu’ils en fassent encore des montagnes. Rock, pop ou chanson ? En fait, les trois ! Et les amateurs de chacun de ces genres y trouveront leur compte, leur plaisir, au moins à l’écoute de l’album et dans de bonnes conditions, car parfois la musique gagne sur les paroles. Ce ne seraient que simples et futiles mots que ça ne gênerait pas, mais c’est du Montagne, une fine plume, une voix douce à la charge mélodique, et il convient de n’en rien louper. Car ce n’est pas rien, loin s’en faut. Si la parole de Laurent Montagne est rare (son dernier album remonte à il y a six ans), son habileté d’écriture est la même, dans laquelle se nichent, se développent des idées fortes, des résolutions, des engagements. Ainsi Il pleut, à ma connaissance une des premières chansons résolument ainsi qui vous savez : « Mauvais apôtre ou Bonaparte / Bientôt ton Waterloo / Prends la fuite, mais prends-la vite / La foule franchit ta porte / Toi tu dis qu’il pleut / Mais tu nous pisses dessus / Ta fin est proche ». Car, sous la douceur de mots polis, travaillés, la plume de Laurent Montagne devient lame, devient lave, indocile, petits cailloux dans les pompes funèbres des gens de pouvoir, grain de sable dans l’engrenage du système : « Le système t’aime / Comme un vampire aime le sang / Qui coule au fond de tes veines ».
C’est d’ailleurs ça, Montagne : d’un côté focale large, plan fixe sur un paysage, loin de tout, comme un tableau que juste caresse le vent, hors des tumultes de ce monde ; de l’autre, caméra à l’épaule, dans la mêlée politique et sociale, la lutte des individus. Dehors et dedans. Et l’amour en plus, pour lequel il trouve encore des facettes nouvelles, d’autres éclairages, d’autres émotions : « Je trace à la plume / Les lignes de ton corps / Sous la lune en décor / Ton point de fuite en point de mire / Entre mes doigts / Te laisser devenir… » Si la base musicale de ce très bel opus est électrique (guitares, basses, clavier, batterie), le savoureux éclectisme vient sur deux titres (La rumeur, Marguerite) avec le renfort du Trio Zéphyr (alto, violoncelle et violon) : délicieux !
Retenons ce que Montagne tient pour être Chanson : « Je te fais indolente / Frondeuse ou affable / Une douce caresse / Un boulet de canon / Ni maître, ni esclave / Dans la gueule des puissants / T’es belle mais pas mouton / Non, t’es juste une chanson ». A une telle définition, on ne peut que souscrire, qu’applaudir des deux mains, dès demain, aujourd’hui.
MICHEL KEMPER
Laurent Montagne, Souviens-moi, autoproduit/Inouïe Distribution 2019.

Seulement voilà, il y’a aussi la possibilité de vivre un moment rare, un moment suspendu dans le bruyant tumulte du bouillon culturel parisien: Laurent Montagne à la Manufacture Chanson. La Manufacture ce n’est pas l’Olympia et tant mieux : “Cette salle elle est parfaite pour le public parisien que l’on a… pour sa taille. Bon après pour nos chansons rock c’est un peu petit”  confie t’il. Un peu petit en effet, on sera frustré de sentir la retenue des musiciens qui ne voulant pas “agresser” le public tentera de se contenir sans pour autant perdre l’âme rock des titres du dernier album de Laurent Montagne. Le public sera emporté par l’énergie communicative des trois compères qui l’accompagnent sur scène. Ce n’est pas un groupe qui se produit devant nous, mais unis comme les membres d’une fratrie ils ne font qu’un et nous emportent.

“La politique c’est comme l’accordéon. Tu appuies à gauche, ça sort à droite et au milieu c’est du vent”. Laurent Montagne connaît ses classiques en citant Devos. Mais la politique c’est aussi prendre la parole, s’engager en défendant ses positions dans un texte, s’affirmer devant un public. Alors même si ce n’était pas devant une foule en délire de stades ou de meeting, Laurent Montagne s’est engagé vendredi soir devant le public de la Manufacture : “On survit à côté, à défaut de vivre ensemble”, “A quoi ça sert de courir toujours plus vite”, “Toi tu dis qu’il pleut et tu nous pisses dessus”. Autant de phrases, qui percutent, vont droit au cœur et nous le réchauffe. Nous ne sommes pas seuls : l’artiste qui s’engage et porte une parole forte et engagée, ça existe encore.

Laurent Montagne c’est aussi une poésie qui invite au voyage. Il nous emmène dans sa Drôme natale le long de la vallée du Rhône ou encore aux abords de la cathédrale de Maguelone prés de Palavas-les-flots. Il n’y a qu’à fermer les yeux pour suivre son invitation au voyage, alors vous sentirez le mistral caresser les joues et l’iode de la Méditerranée vous chatouiller l’odorat.

Il ne pouvait pas partir comme ça, forcément le public en a redemandé. Alors seul, sans musiciens, sans l’artifice de la technique, juste avec sa guitare, sa voix et son cœur… pour dire au revoir il reprend Barbara : Dis quand reviendras tu ?

Quand reviendrais je ? Au prochain concert assurément… en espérant que cela soit dans une grande salle avec un public bouillant, transpirant, se croyant à un concert de Noir Désir à l’époque !

 

Le site de Laurent Montagne c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de Laurent Montagne, c’est là.

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