AnneliSe Roche et Leonor Bolcatto, deux nouvelles voix gagnées à la chanson
15 février 2019, Agend’Arts à Lyon,
Lyon, on le sait, est devenu est des hauts-lieux de la chanson, un de ses plus précieux incubateurs. Il n’est pas rare d’y faire bonne pioche, comme ce soir encore à la Croix-Rousse, à Agend’Arts. Deux jeunes artistes s’y partagent la scène, non en co-plateau mais en mêlant leurs chansons au fil d’un récital très féminin. Ci-dessous donc AnneliSe Roche et Leonor Bolcatto.
« On perçoit des visages / De multiples images / Les yeux frissonnants de lumière / Sur de lointains rivages / Etranges paysages / Quel est le parfum de leurs terres… » Leonor est franco-argentine et son inspiration tient pour partie de sa Cordillère des Andes, d’où elle a ramené quelques chansons – des vidalas – et de l’inspiration : « Tu es cette envie de chanter / Qui fleurit au fond de mon ventre / Tu es le doux parfum de thé / Et du frisson son épicentre / Tu es la poésie des choses ordinaires ». Le mot est lancé, poésie ordinaire, et c’est ça. Ordinaire mais un rien exubérante, rythmée par son chanrango (un ukulélé) ou son pandeiro (un bohran). Par son visage radieux, parfois acide, qui attire la lumière, son sourire : « Je suis là pour vous plaire / Et si je ne vous plais pas / Je suis capable de n’importe quoi ». Et ce maquillage qu’on dira rituel qu’elle peint de son tube de rouge à lèvres pour le temps d’une chanson où elle nous parle d’une résolution de femme, de liberté dans l’exil, d’une marche insolente brûlée aux braises ardentes. Même si c’est encore vert, l’art de Leonor est devant nous, qui ne demande qu’à s’affirmer de scène sen scènes. Ce sont là belles et alléchantes promesses.
A la (tout de même fragile) assurance de Leonor Bolcatto, AnneliSe Roche oppose une timidité qu’il lui faudra vaincre. On se dit que la clarinette dont elle joue est une protection, un bouclier entre le public et elle. Qui, toute artiste qu’elle souhaite devenir, qu’elle est, se réfugie plutôt dans l’ombre sur une scène qui, par définition, est baignée de lumières. Rien d’exubérant en elle, sage tenue, sobre posture. Mais elle chante, donc. Et chante bien. Oh, dans les premières phrases, on subodore bien non l’origine des chansons (ce sont les siennes, paroles et musiques) mais l’influence, la famille dont elle peut se réclamer. On s’imagine sans mal qu’elle a souvent écouté Anne Sylvestre, et pas que par Les Fabulettes. La structure même de pas mal de chansons d’Anne Lise épouse celle de son aînée ; les sujets aussi, féministes comme il se doit : « Que c’est mignon / Que c’est mignon / La vie de Maryline c’est pour les biberons ». Une seconde parenté saute sinon aux yeux, au moins à nos oreilles : celle de Morice Benin, poésie et philosophie et cette façon si particulière de les chanter.
On le sait, la valeur n’attend pas le nombre des années ; nous voici déjà redevables à AnneliSe de très belles chansons. Dont une plus encore : « Pour notre amour de la vie / Narguant vos manques d’espièglerie / Pour vos sacrifices en secret / Pour l’avenir à envisager / Pour l’ingratitude accumulée / Pardonnez-nous l’ignorance / Pardonnez-nous nos enfances / Comme nous pardonnons aussi / A ceux qui nous ont enfantés ».
AnneliSe chante, alternant sa voix avec la clarinette (mais avec Louis Roudaut, son guitariste) ou au contraire s’accompagnant au clavier. Elle dit aussi, paroles sans musique, sa poésie. Rien que le timbre de sa voix donne plus encore consistance et relief aux mots : c’en est un régal. Parachevé en beauté par Les plages de sel, autre morceau de bravoure de ce tout début de carrière : « On aimait le vent et la mer nous aimait / On se sentait grand, on se sentait pousser / On prenait le temps de peindre nos ailes / Allez venez, je vous ramène sur nos plages de sel ».
Le facebook d’AnneliSe Roche, c’est ici ; le facebook de Leonor Bolcatto, c’est là.
AnneliSe Roche, Cinq portraits
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