Barjac 2018. Belle qui tient ma vie
Sauvé dans En scène, Festivals, François Bellart, L'Équipe
Tags: Barjac 2018, Marie-Paule Belle, Nouvelles
30 juillet 2018, Espace Jean-Ferrat à Barjac,
Un coup de jeune ! Voilà sans doute ce que sont venus chercher les spectateurs de la cour de château pour cette soirée Marie-Paule Belle qui a attiré au-delà des festivaliers… Et ils n’ont pas fait une mauvaise pioche : ils ont retrouvé l’artiste telle qu’elle était quarante ans plus tôt, déjà seule derrière son piano, avec la même énergie, la même détermination, le même humour et la même maîtrise du tour de chant. Et elle est belle, Marie-Paule, dans son ensemble noir et blanc malgré la chaleur, ses cheveux sont plus lisses, son visage moins creusé, et son nez – qui inspirait Serge Lama – toujours le même, supportant de petites lunettes fines ! Sa voix un peu plus grave a gardé toute sa puissance, sa diction est impeccable et ses doigts toujours aussi agiles sur le piano. Il y a même un contraste saisissant entre les souvenirs anciens qu’elle partage et la jeunesse de l’interprétation. Vingt et une chansons et quelques anecdotes plus tard, le public lui fait une standing ovation et repart ragaillardi par ce bain de jouvence.
En retricotant les souvenirs de ce concert, ces spectateurs se rendront compte de la pertinence du choix des chansons, et de leur adéquation, à la fois avec l’âge et le vécu de Marie-Paule, avec l’actualité de leurs sujets et avec le plaisir de les faire rire. D’abord nombre de chansons choisies tournent autour du regard des anciens ou sur les anciens. Ainsi, elle propose Les petits dieux de la maison, chanson d’hommage à une aïeule, et aussi de la tendresse sur Les vieux qui dansent, et lorsqu’elle propose des chansons du répertoire, elle choisit L’éloge des vieux, d’Yvette Guilbert sur un poème de l’abbé de Lattaignant. Dans la même lignée, beaucoup de chansons très émouvantes concernent des événements du passé d’une personne ayant déjà bien vécu. Par exemple le long cheminement qui aboutit à Quand nous serons amis, cette amitié encore célébrée avec Celui, l’évocation d’une séparation de destinées dans Jersey, Guernesey, la nostalgie des Petits patelins, le rappel des temps difficiles pour les homosexuelles avec Celles qui aiment elles… Et on n’oublie pas les cimetières avec Ou est-ce qu’on les enterre ! Autre sujet abordé en chansons, des indignations toujours actuelles se rapportant à la violence conjugale avec Assez, interprété avec force et dans un grand silence d’écoute, ou le regard déjà évoqué sur les amours homosexuelles, ou aussi l’empathie pour certains métiers insipides du spectacle avec Un peu d’angoisse et de café. Enfin, l’humour et la drôlerie pour lesquels elle convoque des chansons du répertoire passé (Elle vendait des petits gâteaux, la biaiseuse, Les amis de monsieur) ou ses propres chansons de plus de quarante ans d’âge et n’ayant pas pris une ride (Wolfgang et moi, L’œuf, La clé – qu’elle reprendra crânement et d’un seul trait après un gros trou de mémoire ! et évidemment La Parisienne en bis). Et au-delà de cette dialectique, grand moment d’émotion collective, elle quitte la scène avec Dis quand reviendras-tu chanté en duo avec Pascal Mary (qui assurait la première partie) et repris par le public.
Marie Paule Belle construit donc son tour de chant avec beaucoup de doigté, de réalisme et un grand sens du respect du public. Elle assume son âge et les préoccupations qui s’y rapportent, elle reste ouverte aux problèmes actuels des personnes et utilise avec un subtil dosage l’humour qui permet de vivre et l’émotion qui permet de vivre ensemble. Le tout avec l’abattage sur scène de la chanteuse trentenaire qu’elle n’est plus depuis longtemps, et un contact spontané avec le public qui le lui rend bien. Impressionnante.
Le site de Marie-Paule Belle, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’elle, c’est là.
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