Avec le temps 2017. Radio Elvis, chanter dans ce silence bleu
10 mars 2017, Espace Julien à Marseille,
Troisième plateau et dernier des cinq concerts de la journée. Jeune trio mené par le poitevin Pierre Guénard, au physique à la fois sage et fringant, chanteur venu du slam, auteur, compositeur, guitariste et musicien, accompagné du percutant et intense Colin Russeil à la batterie et au clavier et de Manu Ralambo à la basse, ses co-compositeurs. Nous l’avions repéré lorsqu’il avait gagné le Pic d’or en 2014 et participé au radio-crochet de France Inter.
A 29 ans, ce jeune homme ambitieux à l’apparence timide en paraît beaucoup moins. Depuis 2014, c’est un parcours sans faute : en 2015 prix du Jury iNOUïS 2015 du Printemps de Bourges et coup de cœur de l’Académie Charles-Cros, en 2016 album révélation de l’année du prix des Indés, en 2017 album révélation de l’année aux Victoires de la Musique.
Le trio s’inscrit dans la lignée de ces jeunes groupes de rock alternatif qui n’hésitent pas à chanter ou dire des textes poétiques sur leur musique, décrivant leur quête du monde, tels Fauve ou Feu ! Chatterton. Ils ont la fougue de la jeunesse, cette sagesse un peu idéalisée tirée de leurs lectures, l’art de créer une atmosphère immédiatement reconnaissable entre leur ambiance musicale et la voix vibrante du chanteur.
« C’est le jour des noces je reviens par les ruines / La mer a laissé en partant / La carcasse d’un léviathan / Il n’y a plus qu’à vieillir ». Ils se présentent sous les projecteurs bleus, jaunes et violets : « Nous sommes Radio Elvis » et annoncent, déjà, « que quelque chose existe », leitmotiv d’une chanson interprétée plus tard, Solarium. Mais c’est avec La route, chantée déjà en 2014 que s’affirme ce style musical propre, cette façon particulière de rouler les paroles, en syllabes bien distinctes sur 3 tons répétés, soulignés à la batterie de 5 coups vigoureux sur le tom, avec les variations au clavier, et les hurlements de la guitare et de la basse. « Un à un un, les mirages s’éteignaient / Ne laissant sur la terre que la soif et / À mesure que la vie s’éloignait ma voix / Perdait de sa / Force ! », ah cette petite coupure avant d’accentuer « Force ! »
Pierre Guénard, très en mouvement sur scène, a l’art d’utiliser sa belle voix frémissante, en la modulant, la ralentissant, l’accentuant pour renforcer les paroles, de chanter a capella « D’un pas léger devenir géant / Passé le fleuve gardera nos pas » avant de laisser repartir les guitares. C’est tout ce qui fait l’intensité dramatique de son jeu. Les mots reviennent en injonctions répétées « La force est à ceux qui restent maîtres d’eux. » A la ballade fiévreuse « Juste avant la ruée, ils lèvent les yeux au ciel / Les baissent sitôt levés tant le ciel est lourd » répondent les mélodiques Au loin les pyramides ou, parmi les premiers succès, La traversée ou Demande à la poussière. Goliath « Voyez-les s’élancer / À corps perdus dans des / Saisons trempées d’errance !! » sonne très Bashung. Hommage lui sera d’ailleurs rendu avec la reprise d’Osez Joséphine illuminée par des projections de motifs circulaires, fleurs, triangles, hélices tournantes de lumière blanche. Le solo de guitares avant le « Rien ne s’oppose à la nuit », très rock, récolte les suffrages du public. Il ne manquera ni Les moissons et leurs « Ola Ola Ola / Tout doux tout doux » sur fond de notes de claviers tourbillonnants ni le Caravansérail « Laissons la mesure de ce que nous sommes ».
Le site de Radio Elvis, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs en a déjà dit, c’est là. Actuellement en tournée en France.
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