Avec le temps 2017. Une histoire d’O, de boue et de feu
10 mars 2017, Festival Avec le temps, La Mesón, Marseille,
19 heures, O vient de s’installer. O, c’est Olivier Marguerit, chanteur guitariste et jeune auteur compositeur marseillais, entouré de Mathieu Jacques au clavier et Jérôme Laperruque à la batterie. Totale découverte pour moi, O c’est bien sûr l’initiale de son prénom, c’est aussi l’eau qui l’inspire, c’est Histoire d’O qu’il a illustré musicalement à la Maison de la Poésie, c’est enfin une façon de composer de la musique qu’il a souhaité expérimenter dans son dernier album …Mais taisons-nous plutôt pour l’écouter…tout de suite saisis par cette atmosphère entêtante, envoûtante, cette voix haute, si haute, si retenue et qui pourtant s’évade pour s’arrêter brusquement « Je suis la rivière coulant à tes côtés / Baigne toi dans mon lit ».
Cet expérimentateur insatiable, modeste voire timide, de formation jazz au départ , n’a eu de cesse de s’améliorer, de maîtriser les instruments, les rythmes, les harmonies et les mélodies, pour aboutir à cette musique pop élaborée, étincelante, sans jamais vouloir se laisser enfermer dans un style. Sur scène c’est une véritable bombe qui vit totalement ses chansons introverties par l’inspiration et extraverties par la musique et l’expressivité, la force vitale dégagée. Jamais sans doute l’expression d’orgasme musical n’a été aussi appropriée, et pas seulement dans ces chansons d’amour, ou de sexe (A kiss mêlée d’enregistrements de femme en jouissance) ou dans cette évocation de la naissance de sa fille Mon Écho.
De ces renversements harmoniques, ces inversions, ces ruptures de rythme, ces silences, naît une émotion qu’on ressent même sans rien connaître à la musique. Qu’il chante en français ou en anglais, il a une façon irrésistible de nous envelopper dans son univers.
O regarde la vie en perpétuel émerveillement, de ses grands yeux écarquillés, avide de tout saisir, de tout transmettre, de l’odeur du coton à la mort de son ancêtre Jean Sébastien Chalard, porte-drapeau sous Napoléon « La boue dans le cœur / Un drapeau tatoué / Ce drapeau tatoué sur mon corps ».
Saluons la performance des musiciens, le tempétueux, l’aventureux, le sensible claviériste comme le spirituel batteur (malade parfois, solide toujours, je cite Marguerit) qui le suivent, le précèdent au plus près, dans ses délires, ses silences, ses cris, ses peurs « J’ai tellement peur de disparaître ».
Quand O chante en toute fin Le secret de Gabriel Fauré sur quelques notes égrenées au clavier, de cette voix de haute-contre, fragile, il plante sa dernière flèche dans nos cœurs…
Ces deux groupes si différents présentés ce soir à la Mesón, l’un puisant son inspiration dans le passé, l’autre très contemporain, s’avèrent détenir en commun, outre la voix en altitude de leur chanteur, l’art de créer des univers où l’on s’immerge totalement.
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