Georges Chelon, millésimes 2015 et 2016
Il est arrivé discrètement dans la chanson, en pleine période yéyé. Enfin, discrètement n’est peut-être pas d’ailleurs pas le mot juste. Ce fut quand même un coup de gueule venu de loin qui signa son entrée dans la chanson, avec Père prodigue : « Ah ! te voilà, toi… » Une chanson arrivée comme un cheveu sur la soupe, ajout de dernière minute sur son premier album : ce fut le succès que l’on sait, qui tranchait tant d’avec ce qu’on entendait alors à la radio. Déjà sa voix douce grondait. Comme la plupart des grands chanteurs, Georges Chelon ne chante vraiment que lui-même, ce qu’il vit ce qu’il ressent, dans le tumulte des sentiments.
Cinquante ans et quelques mois que ça dure. Et depuis bien longtemps à l’ombre des médias : depuis son Soliloque de 1969 s’il faut dater précisément, chanson dans laquelle il osait quelques bonnes vérités contre la télé, contre le métier. Pour rester en haut de l’affiche, il ne faut pas critiquer le métier : il est rancunier…
Ça fait donc presque le début que Georges Chelon trace ses sillons à la marge de ceux convenables et convenus, comme une chanson non officielle, invisible aux médias, qui toujours tente d’exister malgré la chape de plomb. En somme le commun, le banal, de la plupart de ses confrères d’infortune.
On laissera le soin à plus spécialistes que nous de démêler les albums originaux des compilations dans sa discographie pour le moins fournie : plus d’une cinquantaine d’albums.
D’une étonnante régularité, il nous en sort chaque année un nouvel. Sa précédente livraison, La belle endormie, nous parlait entre autres de ces dessinateurs martyrs de Charlie-Hebdo : « Je veux rire sur terre comme au ciel / De tout, de rien et dire : je pense / Même si ça n’a pas d’importance / Même si cela ne sert à rien. » Un disque inquiet, plus encore depuis ce triste mercredi, un disque où s’insinue la peur, où s’affiche le résolution : « Quels que soient les noms qu’on Lui donne / On Le porte en son cœur, en dedans / La foi est une affaire d’hommes / Que les Dieux nous pardonnent / Je n’y crois pas vraiment. » Ce n’est pas la première fois que Chelon interpelle Dieu par ses vers sévères.
Plus récent encore, nous arrive en ce début 2016 Dans la cour de l’école, où Georges Chelon se retrouve en enfance. La sienne à la communale, la nôtre et celle des gosses d’aujourd’hui, le monde des enfants, leurs réflexions, les objets et passions de leur quotidien. Un disque pour enfants ? Oui, ça peut. Un disque pour adultes aussi, de ceux qui s’attardent un peu et discutent avec enfants et petits-enfants de tout et de rien, de choses importantes à leurs yeux, cow-boys et amourettes, de cirque et de chevaliers du moyen-âge…
C’est du Chelon, doux, inspiré, délicatement écrit. On a envie de dire inoxydable. Qu’on peut découvrir ensemble, grands-parents et enfants.
Seul reproche : des textes hélas très incomplets (faut aller les lire sur le site d’EPM) sur le livret joliment illustré par Malik Taï William.
Georges Chelon,La belle endormie (Charlie), EPM Universal 2015, Dans la cour de l’école, EPM Universal 2016. Le site de Georges Chelon ne fonctionne pas ; le site d’EPM page Chelon, c’est ici.
La belle endormie, 2015
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