40e Rencontres d’Astaffort : la fabrique de chansons
REPORTAGE. Quarante fois déjà, en vingt et un an, que l’ancienne école accueille sa fournée non d’élèves mais de stagiaires, qu’ils soient « en dévelop- pement » ou déjà confirmés ; que, de partout dans la cours, dans les salles, des artistes s’essayent à des mots, à des notes, en solo ou par petits groupes, sur les conseils d’illustres formateurs. Nous sommes ici à Astaffort, Lot-et-Garonne, la petite ville chère à Francis Cabrel. Là, où dans des lieux désaffectés, le chanteur et l’Association Voix du Sud ont créé Les Rencontres qui sont tant un lieu de ressourcement que de formation et de création pour la chanson.
Les stagiaires sont arrivés avant-hier en début de soirée. accueillis par un apéritif, histoire sans doute de les faire entre plus vite encore dans le feu de l’action, dans l’envie non d’en découdre mais d’en-chanter.
Le reste, deux d’entre eux nous le racontent. Jacinthe Ravandison et Amaury Massion au micro de NosEnchanteurs…
Sous le pseudonyme de Lylac, Amaury est un artiste bruxellois. S’il est aujourd’hui à Astaffort, cela tient pour partie au hasard. Car lui – il suffit de se rendre sur son site pour le constater – n’écrit pas particulièrement en français. Dans ce pays aux trois langues, une grosse partie de la scène musicale chante en anglais : « Ça met tout le monde d’accord ! » Reste que, souvent, on lui pose cette question : « Pourquoi vous n’écrivez pas en français ? » Il y a trois ans, l’association liégeoise Ça balance lui a offert une retraite avec des coachs d’écriture. Résultat : deux titres en français sur le nouvel album. Et c’est encore cette association qui l’a incité à postuler aux Rencontres d’Astaffort, « un événement exceptionnel qu’en Belgique les gens connaissent » souligne avec plaisir Amaury.
Si Lylac est ici « c’est vraiment pour écrire en français », sans doute dans la perspective d’un troisième album entièrement en français. « J’ai découvert une autre facette, induit une autre façon d’écrire, un travail plus fort, un positionnement sur les paroles. »
Comme pour ses treize autres collègues (le quinzième n’a pu in extremis les rejoindre), le plus stressant fut d’arriver, ici, dans cette ancienne école devenue haut lieu de formation à la chanson. Après l’apéro, après le repas, tous ont été invités à se présenter, expliquer leur parcours. Et chanter. « C’est ce qu’il fallait faire, explique Lylac : là, nous sommes au deuxième jour mais c’est comme si on se connaissait déjà depuis un mois. » Ce soir, il aura une deuxième chanson de terminée. Et l’amorce d’une troisième. « On a mis le focus sur la notion d’accroche, un moment de climat, en piochant des mots ici et là, en feuilletant même des journaux. » Et ça produit comme jamais, mais pas en solitaire. Ici chacun prend un rôle. On est le compositeur, ou le parolier. Parfois seulement l’interprète : on travaille avec les autres. Avec des formateurs aussi, des pointures du métier, tels Marc Estève pour les textes ou Julien Lebat pour la musique.
Une chanson par jour, parfois plus ? « On n’est pas tous aussi prolifiques mais on est là pour produire » répond Jacinthe Ravandison, parisienne d’origine malgache : « C’est bien de pondre au moins une chanson. On est dans un contexte où il faut rendre un travail avec un délai réduit. Et des contraintes. » L’accroche verbale d’hier matin pour Jacinthe était « la mémoire jaune », autour de quoi elle devait écrire une chanson, qu’un autre composera. « Ici, c’est sortir de notre solitude habituelle, se confronter à d’autres » insiste Jacinthe, pour qui c’est nouveau, elle qui faisait ses paroles et musiques seule dans son coin. Jacinthe est depuis quatre ans dans la métier. Si elle a un éditeur, elle n’a pas encore de producteur. A son actif, deux ep autoproduits et tout un album gourmand de titres spécialement pour le marché japonais. Le Japon ? Oui, un chasseur de tête a entendu sa voix : depuis elle s’est fait un nom chez les nippons, où elle a récemment chanté en première partie d’Ayo.
L’aventure en Astaffort de Jacinthe, Lylac et les autres durera dix jours. Dix jours d’intense formation professionnelle qui, n’en doutons pas, les marquera dans leur devenir artistique. Nous y reviendrons d’ici à quelques jours.
Le site des Voix du Sud. Ce que NosEnchanteurs à déjà dit des Rencontres d’Astaffort, c’est ici. Le site de Lylac, c’est là. Celui de Jacinthe, c’est ici.
Lylac, « De si peu », Astaffort, 2015
Jacinthe, « Hugo », 2015
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