Patrik Ewen, barde à barbe (comme il se doit)
EDF. Ewen, Delahaye, Favennec. Nos amis bretons sont désormais inséparables, mus par l’incontestable succès de leur trio entre tous décapant. Pourtant nos trois compères viennent de faire chacun un nouvel album, les trois disques sortant simultanément, à l’enseigne de la même crémerie il va de soi. On en parle ici, mais séparément, en commençant par Ewen. Suite dans les prochains jours.
Mine de rien, ça fait vingt ans que Patrik Ewen n’avait pas fait de disque en solo, depuis ses Berceuses pour les vieux enfants, c’est dire… Car le conteur qui est en lui conte sans compter… A trop conter on déchante… Il a fallu ce trio EDF, avec ses copains Gérard Delahaye et Melaine Favennec, pour que notre ami réinvestisse le chant. Un premier album du trio en 2002, un autre en 2007 puis ce nouvel opus, Kan tri men, l’an passé. Et ces concerts de plus en plus nombreux, nourris d’un bouche-à-oreilles fameux. Le chant revient, joyeux, s’impose comme une nouvelle évidence…
Voici donc Liberté attitude, un disque que les fous du folk tiendront pour important, qui prélève parfois à la tradition (comme Le Dauphin– The great silkie of sule skerrie –, signé Serizier et Marchais, qui figurait jadis sur le premier album des Tri Yann), convoque de grands bretons (Glenmor, Pierre-Jakez Hélias aussi, celui du Cheval d’orgueil) et, sous des airs éternels, nous parle du présent. C’est en breton, en anglais, en français et c’est comme un carnet de notes souvent consulté, chansons de chevet, du quotidien : « Depuis longtemps je chante ou je fredonne ces chansons en sciant du bois, en plantant des pointes ou en roulant seul dans ma voiture. Ces ballades venues d’Irlande, d’Ecosse, de Bretagne ou du fond de mes rêves, j’ai eu envie de les graver pour marquer mon chemin d’une petite pierre blanche. » La voix est chaude, franche, que rehaussent encore banjo et flûtes, accordéon, small pipe et low whistle, claviers et autoharp. « Mon bien-aimé navigue depuis longtemps / Sur le dos des vagues, au large sur l’océan / Dans la houle qui roule le bateau sans fin / Il regarde la mer qui écume au loin. » Bien sûr, pour cet habitant des Monts d’Arrée, la mer et les ports sont omniprésents, mais plus encore cette terre de Bretagne, son imaginaire. Et ses montagnes chéries.
« Alors pour tromper l’ennui / On a chanté toute la nuit / Des chansons de Donovan / Pete Seeger, Woody Guthrie… » On tiendra Patrik Ewen pour barde (la barbe y fait), pour indécrottable folkeux. Pour folk-singer aussi, dont l’interprétation de La fanfare jouait Valsez Mathida nous rappelle Graeme Allwright (par qui Ewen débuta dans la chanson). On le tiendra surtout pour chaleureux compagnon qu’on aimerait faire complice de soirées, de veillées, reprenant avec lui sa Liberté attitude comme on partage des souvenirs de korrigans ou de fées et des rêves de mât de misaine. Faut-il dire que ce disque est excellent ?
Patrik Ewen, Liberté attitude, 2012, Dylie/Coop Breizh. Le site de Patrick Ewen (pas très à jour…) c’est ici. En vidéo, non le chanteur mais le conteur Patrick Ewen dans « Les récits barbares » :
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