Saint-Gély-du-Fesc 2024. L’ami de Georges
Festival « J’ai rendez-vous avec vous », 9 novembre 2024, Scène en grand Pic Saint-Loup à Saint-Gély-du-Fesc,
Ce n’était pas la première fois que Moustaki trônait à ce joli festival. La perspective de lui consacrer une nouvelle soirée était tentante. Un artiste en vue tourne actuellement un spectacle sur lui, mais le cachet et les conditions sont, selon les organisateurs, hors de leur portée. Alors leur est venue l’idée folle de monter eux-même une soirée Moustaki, de toute pièce. Quatre chanteurs et musiciens, que ne se connaissaient ni d’Ève ni d’Adam sont contactés à cet effet : ils auront deux journées de résidence pour aboutir au résultat final. Défi a priori impossible. Et pourtant amplement réussi : bravo ! Nommons nos lauréats de cœur : Morgane Montagud au chant, Marie Tournemouly au violoncelle, Pierre-François Maurin à la contrebasse et Jeremy Bourges au piano.
De blanc vêtus (comme Moustaki en scène), ils ont contenté le public, au-delà sans doute de ses attentes. La chose s’entend : c’était épatant, à quelques petits réglages près, notamment les commentaires bien trop bavards, pas toujours utiles, du pianiste Jeremy, visiblement le meneur de jeu.
Mais c’est surtout la sélection des titres chantés ou joués qui pose ici problème. Rien que des « tubes », fièrement revendiqués par nos repreneurs du soir. Outre le fait qu’un « tube » est forcément creux et ne correspond donc guère à Moustaki, pourquoi ce choix ? Au générique, que du prévisible : Le Temps de vivre, Ma solitude, Ma liberté, Le Métèque (magnifique interprétation de Morgane !), Gaspard, Portugal, Sans la nommer, Les amis de Georges il va sans dire, Il est trop tard… Aucune surprise n’est venue, si ce n’est la qualité (à ce niveau, ça relève du pléonasme) de l’interprétation.
Quand on a la chance, sur le simple nom de Moustaki, de rassembler une salle pleine, à guichet fermé, ne serait-il pas plus juste et judicieux de faire place au moins à quelques titres moins en vue et tout aussi intéressants : ce n’est pas ce qui manque dans l’œuvre pléthorique du bonhomme.
Car, au moins dans les commentaires du pianiste, le propos de ce spectacle est politique. Le fait de privilégier à outrance les « tubes », à savoir l’expression commerciale exacerbée, s’oppose complètement au propos. Il y a hiatus entre la théorie et la pratique. C’est à remédier pour la suite, s’il y a. De même, deux des piliers de Moustaki sont ici maltraités : le Brésil et la Méditerranée. Certes, ils chantent Bahia mais la surimpressionnent par leurs remerciements de fin de spectacle : ça ne compte donc pour rien. Et oublient totalement, ici, à quelques kilomètres de cette mer, la Méditerranée sans qui Jo Moustaki ne serait rien. Ça ce n’est pas faute de goût, c’est faute.
A part ça ? On souhaite que ce spectacle prenne la route, car justement il tient la route. Musicien-ne-s d’un talent fou, grande musicalité justement, les ingrédients sont là et ils sont bons. Comme le chante Reggiani, « il suffirait de presque rien… », remanier quelque peu la set-list, redonner son juste lustre au Brésil (je vous suggère Les Eaux de Mars), faire la part qui lui convient à la culture méditerranéenne (prenez En Méditerranée !).
Ce spectacle que les organisateurs ont trouvé trop cher et n’ont donc pas pris, je l’ai vu sur scène. Et j’ai sans l’ombre d’un doute préféré cette création de Saint-Gély-du-Fesc. Qui était… presque parfaite.
Ce que NosEnchanteurs a déjà dit de Georges Moustaki, c’est là.
« Les Eaux de Mars », audio (50 titres) :
« En Méditerranée » session 1971 :
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