Claude Semal casse la baraque (à frites)
Namur, La Templerie des Hiboux, 25 mai 2024
Chanteur de la belgitude par excellence et jamais en manque d’idées, Claude Semal a inventé le Frit’concert. Le concept est simple : avant de goûter aux plaisirs de ses chansons, le spectateur peut déguster un paquet de frites-mayo offert par la maison, histoire de se mettre en appétit. La particularité est que cette collation est préparée par l’artiste lui-même, avec amour, compétence et blanc de bœuf. La formule est éminemment conviviale, la frite belge étant la garantie d’une soirée réussie.
Après une bonne heure de distribution gastronomique, le public nombreux est donc invité à pénétrer sous le chapiteau que la folle équipe de la Templerie des Hiboux dresse durant l’été dans le jardin de son théâtre. Le temps d’ôter son seyant tablier de cuisine et de se laver les mains, notre chanteur-cuistot nous rejoint sur la scène, accompagné de son comparse guitariste-pianiste Pascal Chardome. Et de se lancer tout de go avec La pension, chanson faussement naïve et engagée à la fois. Les rires fusent d’emblée et les applaudissements crépitent. La soirée sera bonne.
L’humour est bien sûr de la partie, que ce soit dans les chansons ou dans les interventions entre deux morceaux, où Claude Semal, par ailleurs comédien chevronné, fait toujours preuve d’un réjouissant second degré pour évoquer sa situation d’artiste belge d’âge presque canonique. Nous avons ainsi pu découvrir les affres qu’entraîne la possession d’une Bite philanthropique, compatir aux malheurs des Eclopés de la clope, voire partager cet aveu inattendu du chanteur : Je pète au lit !
Il serait cependant erroné de classer Claude Semal parmi les chanteurs humoristes. Dans le concert, les chansons de révolte, de mélancolie et de nostalgie se taillent en effet la part du lion.
Dans la première catégorie, Dormir dehors dénonce l’absurdité de ce monde qui voit des gens dormir dans des cartons étalés devant des immeubles vides, tandis que Les animaux adieu lance un cri d’alarme écologique. Quant à la chanson des Marcheurs, elle vient opportunément rappeler aux individualistes de tous bords que les différents progrès sociaux ont toujours trouvé leur origine dans les mouvements collectifs.
Les chansons d’amour (Une petite valse pour toi, Lola…), d’amitié (Les papillons, hommage à François Béranger), de mélancolie sur le temps qui passe (Devenir vieux) et de lucidité sur la mort qui rôde (Au café de l’univers) viennent compléter le tableau. Sans oublier deux chansons qui font de Claude Semal le dernier chanteur réellement belge : la désabusée Comme en Belgique et cet hymne immortel, revu ce soir à la sauce bluesy, Le pays petit.
Pour être complet, signalons encore que l’assistance a eu le privilège de découvrir trois nouvelles chansons (dont celle intitulée C’est à la fin du bal qu’on paie les musiciens est assurément la plus marquante), petite mise en bouche pour un futur album à venir. Joie : notre fritologue pensionné en a donc encore suffisamment sous la pédale que pour nous offrir un (ultime ?) opus !
Comme d’habitude, le public conquis, dont certains membres découvraient l’artiste pour la première fois, y allait de la traditionnelle question d’après-concert : « Mais pourquoi ne l’entend-on pas à la radio et ne le voit-on pas à la télé ? ». Claude Semal reste désespérément un secret trop bien gardé. Courez l’applaudir s’il est programmé près de chez vous, ce serait trop bête de vous en priver.
Le site de Claude Semal, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.
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