Pierre Perret « Bernard Pivot »
J’ai eu envie de faire en m’amusant
Une petit’ chanson
A propos d’un monsieur qui vient souvent
Dans notre maison
Il s’agit pas du facteur du plombier
D’un représentant cass’ pieds
Il rend intelligent mêm’ les plus sots
C’est Bernard Pivot
Un homme illustre disait des Français
Ce sont tous des veaux
On a depuis fait de nombreux essais
Pour changer de peau
Mais c’est pas avec le loto ou Dallas
Que nos cellul’s se décrass’
Un homme est v’nu rehausser le niveau
Pierre Perret
Paroles et Musique Pierre Perret. Extrait de l’album « Irène » 1986
Bernard Pivot (5 mai 1935 – 6 mai 2024) a eu la politesse d’attendre son anniversaire pour nous quitter. Pourtant on se dit qu’il aurait bien pu attendre ses 90 ans sonnés, voire ses cent ans pour le faire, tant il fait partie de notre univers, tant il nous semblait devoir être éternel.
Pierre Perret, son aîné de presque un an, lui avait consacré une petit’ chanson en 1986, période où il était absolument incontournable dans les médias et le monde des Français, à l’époque où il animait Apostrophes sur Antenne 2, émission littéraire qui a marqué le XXeme siècle, de 1975 (succédant à Ouvrez les guillemets) à 1990. Pierre Perret décrit bien l’engouement du public pour cette émission : « Car le soir de diffusion d’Apostroph’s / Plus un chat dehors / Pour les prolos commerçants philosoph’s / L’émission d’abord ». La chanson est ici enregistrée en public à Namur.
Pivot a réussi un mélange de magazine people et d’actualité littéraire dans les domaines les plus variés « Roland Barthes / Nietzsche et la Bruyèr’ », Marguerite Duras, Alexandre Soljenitsyne, mais aussi Brassens, Devos, Hergé, et même François Mitterrand. Un passage à Apostrophes, pour un auteur, lui assurait à coup sûr des ventes en librairie. Dans une ambiance qu’on ne peut plus guère s’imaginer aujourd’hui, avec une grande liberté de paroles qui allait jusqu’à s’affranchir de la morale et des tabous les plus universels, il recevait avec classe, humour et détachement, en jouant les candides, des invités parfois la cigarette au bec ou largement imbibés, tels Bukowski ou Gainsbourg. La polémique faisant partie de l’émission, sans sacrifier la culture. Ce fut donc la grande discussion (pour rester poli) entre Gainsbourg, qui prétendait que la chanson était un art mineur, contrairement à la peinture (art par lequel il avait débuté et qui était sa vocation revendiquée), l’architecture, la poésie ou la musique classique – parce que ces arts demandaient une initiation – alors que Guy Béart assurait qu’il n’y avait pas d’art mineur (même la cuisine). Nous pencherions je pense pour ce point de vue, il y a peut-être des artistes (le sont-ils seulement) mineurs plutôt que des arts qui le soient par nature. Gainsbourg épargnait d’ailleurs lui-même sans trop de modestie quelques unes de ses chansons…
D’abord journaliste économique, passionné de football comme de grands vins, créateur en 1974 du magazine Lire (qui existe toujours), Pivot avait réussi à démocratiser le livre et même l’orthographe, en créant sa Dictée de 1985 à 2005, qui attirait (presque) autant les spectateurs que les Jeux d’Intervilles. De 1991 à 2001 il animait sur France 2 Bouillon de Culture, élargi à toute l’actualité culturelle, cinéma, théâtre etc. Bernard Pivot fut membre de l’académie Goncourt de 2004 à 2019. Il a écrit plusieurs romans, chroniques et essais, autobiographiques ou non, en 2021 … Mais la vie continue, en 2022 Amis, chers amis.
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