Tachan, Brassens, Font & Val et Sylvestre : Héran rend sa copie
11 novembre 2022, Festival Brassens d’Ensuès La Redonne,
Au moins ceux qui possèdent ses albums parus chez Fluide Glacial connaissent bien plus Héran comme dessinateur que comme chanteur. Moi qui fus son complice sur deux ouvrages, l’un consacré à Johnny, l’autre à Renaud (collection « A la plume et au pinceau »), le sais bouffer aux deux gamelles, téter aux deux mamelles. Oui, mesdames, Jean-Marc Héran est aussi chanteur, interprète pour être précis. Et, sauf si vous souhaitez rester rosière et rosissez à la moindre allusion osée, son répertoire leste, gaillard et ma foi raide est pour vous, pour vous initier mesdemoiselles comme pour, le cas échéant mesdames, vous en souvenir : Héran a pris chez Brassens, Tachan et Font & Val ce qui jadis méritait avec raison (?) le carré blanc. Et chez Anne Sylvestre ce qui ne passait pas plus en radios qu’en télé.
Voilà, vous êtes prévenus, c’est un récital fortement membré. Certes pas que ça, mais. Dans les rimes et sur écran géant : Héran le dessinateur n’hésite pas à y faire fleurir des sexes bien plus gros que lui, ce qui, en soi et vu sa taille, est un exploit. Car Jean-Marc fait crayon de tout bois, qu’il taille à la mesure de ce qu’il interprète. Je parle de bois, aussi de cire, mais ça c’est pour la Mélanie de Brassens qui « dedans ses trompes de Fallope, s’introduit des cierges sacrés ».
C’est un plaisir des sens, presque un festival. Par la projection des irrésistibles dessins, desseins et des seins d’Héran, par l’interprétation frondeuse et malicieuse de ces petits bijoux sortis tout droit de l’enfer de la chanson (« l’enfer » était le nom du local fermé à double tour où Radio-France remisait jadis les disques interdits d’antenne). Des chansons où on ne sait ce qui prime de l’intelligence, du culot, du talent ou de l’élémentaire expression de la liberté : des quatre à la fois je crois. Jean-Marc Héran les chante avec simplicité, malice et bonhommie. Simple et jolie restitution qui nous conte les choses de la vie.
Héran nous chante Brassens, pas forcément dans ce qu’il a de plus connu (Les Casseuses, La Légion d’honneur, La Chaude-pisse…), mais admettons qu’on connaît le chanteur à la pipe. Il nous chante aussi Anne Sylvestre (Les Gens qui doutent, Une sorcière comme les autres…) et force est de constater qu’elle a largement été oubliée par une partie du public. Quant à Tachan, sauf une poignée d’amateurs, on ne sait plus qui c’est, on ne sait plus rien des chansons qu’il éructait, des postillons qu’il envoyait. Ah, La Pipe à Pépé, Tarzan, Les Z’hommes… ! Il reste Font & Val et leurs chansons subversives, rentre-dedans, qui appellent un chat un chat : Premier amour, Voilà, La Vieille… Et ce bijou enfin exhumé qu’est À Brassens.
Donc, les chansons et les dessins. Mine de rien, c’est vrai que notre dessinateur est un vrai chanteur ! Mais il n’y a pas que ça : les textes et trouvailles entre les chansons sont de sa complice et amie l’indispensable humoriste-actrice Marianne Sergent, celle-là même que les artistes du café-théâtre appellent « la patronne », et qui a bien instruit son petit soldat d’Héran.
J’ai toujours pensé que la chanson était d’utilité sociale : Héran le prouve avec superbe, il suffit de voir la réaction du public pendant le spectacle et les sourires à la sortie : on se dit alors que ses spectateurs, même et surtout les plus anciens, vont prolonger ces chansons et sûrement mettre en pratique les préceptes de Tachan, avant qu’il ne la casse, avant qu’elle ne trépasse. D’utilité sociale, vous dis-je.
Le site de Jean-Marc Héran dessinateur, c’est ici. Ce que NosEnchanteurs a déjà dit du dessinateur Jean-Marc Héran, c’est là.
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