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Jacques Bertin, seul dans le paysage

La pochette de l'album : une photo signée Bertin

La pochette de l’album : une photo signée Bertin

« Le désespoir est une forme supérieure de la critique » disait Léo Ferré. Peut-être. Mais c’est probablement aussi le terreau d’un espoir nouveau.

L’Hymne d’ouverture donne le ton : « Vous étiez réunis / Toutes vos solitudes prêtes à s’embraser… / Et ce feu qui nous porte c’est le chant. »

La dernière chanson porte comme une offrande un vœu éternel, remettant Rudyard Kipling au goût du jour : If, dans la traduction adaptée d’André Maurois, avec sa chute prometteuse : Tu seras un homme, mon fils.

L’espoir désespéré de Bertin est conçu d’un peu de douceur, de tendresse, d’amour, de joie, de beau temps ; « Un peu d’espoir, trois fois rien. » Ce sont des gestes simples, accessibles, qu’il nous faudrait retrouver. Les chemins de ce bonheur-là passent par des jardins plus extraordinaires encore que celui de Trenet ou par des bistrots aux noms de rêves, sur des musiques langoureuses ou plus rythmées. Notons les accompagnements de Laurent Desmurs aux claviers et de Francis Jauvain à l’accordéon ou l’accordina, qui soulignent avec de belles nuances et quelques beaux éclats, les textes magnifiques.
Nous sommes en effet dans ce no man’s land aux confins de la chanson et de la poésie. A ses propres créations, très récentes ou plus anciennes retrouvées, Jacques Bertin associe Le cri d’écoliers dans les cours de Lucien Massion (vous souvenez-vous de son album L’Ombilic, en 1987 ?) et quelques poèmes qu’il a mis en musique : Paul Valéry, Valéry Larbaud, Louis Aragon et bien sûr Luc Bérimont, en particulier Je suis plus près de toi, avec une musique de Lise Médini, qui était déjà au répertoire de Jacques Douai. Mais aussi, parce que ce disque comme les précédents demeure dans l’intemporel, deux chansons du folklore. « Quel plaisir » nous dit Bertin en commentaire « de les mêler à la “grande” littérature, comme si c’était le même monde, la même unique chanson, le même fleuve ! »

dos du CD, photo signée Olivier Beytout. « Sur la photo, un énergumène lance dans l’eau sa rame, sa pagaie, son bout de bois ; et on l’imagine qui chante en rythme un vieux machin séculaire. Ce faisant il domestique le fleuve. » (J.Bertin)

à l’intérieur de la pochette, photo signée Olivier Beytout.
« Sur la photo, un énergumène lance dans l’eau sa rame, sa pagaie, son bout de bois ; et on l’imagine qui chante en rythme un vieux machin séculaire. Ce faisant il domestique le fleuve. » (J.Bertin)

Ce vingt-huitième album (si l’on compte les vinyles originaux) pose un jalon dans le parcours de son auteur. Oui, il est seul dans le paysage, mais nous sommes tous seuls. Ensemble demeure une utopie, un vieux rêve à transmettre. Et pourtant, comme la chanson, nous sommes le même fleuve. Un vieil air du jazzman Eric Dolphy me revient : Alone together, c’est la quadrature du cercle, le nœud même de nos incertitudes avérées et, pourquoi pas, l’oxymore de la sagesse.

 

Ce que NosEnchanteurs a déjà dit de Jacques Bertin, c’est ici ; pour commander ce disque, c’est là.

8 Réponses à Jacques Bertin, seul dans le paysage

  1. Trihoreau 18 août 2016 à 9 h 04 min

    Ce n’est pas le dos du CD, c’est à l’intérieur de la pochette !

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    • Michel Kemper 18 août 2016 à 11 h 22 min

      Dont acte ! Notre stagiaire iconographe et iconoclaste sera sévèrement réprimandé

      Répondre
  2. Bruno Papin 20 août 2016 à 12 h 35 min

    Je ne peux me « déprendre » de l’alchimie magique de ce disque ! Quel aboutissement, quelles subtilités dans les textes, le verbe, la diction, le chant magistral….
    Cette alliance si réussie des morceaux de ce disque illumine encore davantage son regard posé sur la vie, son éclectisme, sa densité, son épaisseur.
    Merci Jacques pour cet opus délectable, comme pour ton oeuvre qui vit avec moi depuis 40 années !
    Une vie d’homme !
    « la Loire, comme un anneau… ! »

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  3. Bohmert Bernard 30 août 2016 à 16 h 07 min

    Le titre à lui seul évoque une triste réalité, qui est celle d’un des derniers. Moi qui comme tous ceux qui écoutent Bertin, depuis des années je me demande, oui, mais à la fin qui reprendra le flambeau de ces mots, de cette écriture, de cette musique ? Qui pourra déchirer l’azur en deux et nous parler comme à un frère et nous, lui parler comme à un ami ? Oui nous sommes le même fleuve et certaines de ses rives se sont asséchées. Merci de nous avoir donner un opus de plus et vivement votre prochaine balade au Québec.

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  4. Marc Laumonier 30 août 2016 à 20 h 30 min

    Bien sûr, toujours cette fraternité-là, car JB est pour moi un immense grand frère, qui m’a fait comprendre ce que la grande poésie peut amener dite ou chantée ; ligérien moi aussi – jadis – j’ai toujours retrouvé dans les disques et les livres de JB une humanité débordante, une vigueur du vivre exceptionnelle etc etc quel chant quels textes et même quelles musiques ! encore une fois le feu d’artifice est réussi même si comme Bernard je m’inquiète pour le devenir de cette chanson-là…

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  5. tocade 10 septembre 2016 à 11 h 18 min

    Pour moi son CD le plus beau depuis ‘la jeune fille blonde’ .
    Merci à Jacques Bertin, à sa voix indispensable.

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  6. Gérard 9 juillet 2018 à 20 h 43 min

    Bonjour,

    Je me permets de faire remonter ce fil assez ancien pour informer
    les lecteurs de Nos Enchanteurs que Jacques Bertin chantera samedi 14 juillet 20h30 et dimanche 15 juillet 16h au
    Théâtre de La Closerie
    17 route de Clamecy
    89- Etais-la-Sauvin
    03 86 47 28 16
    http://www.lacloserie-spectacles.fr/
    Si vous passez par cette belle région aux confins de la Bourgogne, de la Puisaye et du Nivernais, vous découvrirez un lieu de culture et de spectacle unique dans la région et magique. Et Jacques Bertin en prime, ça vaut bien un long détour.
    Vous serez accueillis avec toute la sympathie, la convivialité et la générosité de Gérard-André, chanteur, auteur, compositeur et interprète, homme-orchestre de ce lieu où il fait tant pour les autres, dans le contexte difficile que vous connaissez pour notre chanson.
    Sachez que Francesca Solleville et Julos Beaucarne parrainent La Closerie depuis le début -12 ans déjà- et que, pour la chanson, s’y sont produits, outre les susnommés, Anne Vanderlove, Véronique Pestel, Anne Peko, Mouron, Brigitte Lecoq, Céline Faucher, Gilles Servat, Romain Didier, Joël Favreau, Yvan Dautin, Jean-Pierre Réginal, Laurent Berger, Jean-Sébastien Bressy, Gérard Prats, Bernard Bruel… pardon si j’en oublie.
    Ce Récital Bertin s’est initié à l’auberge du Col de la République, où nous nous sommes rencontrés l’été dernier, lui retour de Barjac, moi d’Orange. Et voilà… parole tenue.
    Jacques ne sera pas « seul, dans le paysage » bourguignon, samedi et dimanche prochain.

    Gérard

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  7. Danièle Sala 10 juillet 2018 à 21 h 05 min

    Jacques Bertin, qui sera tout à côté de chez moi, au château de Portabéraud, à Mozac :  » Il était une fois Jacques Bertin », à 18 heures le jeudi 12 juillet, et à Volvic, dans la cour d’honneur du Musée Marcel Sahut, le vendredi 13 juillet, à 14 heures, pour une rencontre-débat sur le livre d’Alain Borer  » De quel amour blessée. Réflexions sur la langue française ». Tout cela dans le cadre des 14èmes Rencontres Marc Robine et entre autres artistes, musiciens, chanteurs, écrivains, philosophes.
    http://lesrencontresmarcrobine.fr/

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