D’un Z qui veut dire…
Qui veut dire zoB’ : c’est son nom d’artiste (comme dit l’un de mes fils, conseiller en Chanson de son père : « C’est glamour ! »). Le petit métier de dénicheur de pseudo ayant disparu cause à la crise, il est de plus en plus difficile d’en trouver un : flûte, merde, bite, zob ! Ce sera donc zoB’, avec un apostrophe pour panache et la capitale – c’est important – pas placée pareil, quitte à frôler l’incident typographique.
Avant d’aller dans le vif du sujet (façon de parler) intéressons-nous d’abord à la façon de parler (ou plutôt d’écrire), du monsieur sus-nommé sur sa pochette (de disque). Il y rectifie notre vocabulaire coutumier. A « paroles » il préfère « sujet, verbe, complément », à « musique » il dit « orchestre » ; à « enregistré à » il revendique « musique capturée chez », et à « mixé » il troque « mélangé ». A « mastérisé » enfin, il dit « nivelé ». Ah, j’oubliais, ceci est pour lui n’est non un « ep » mais un « demi disque » : c’est si simple à dire et plus agréable à l’oreille. Car zoB’ fait dans l’élémentaire délicatesse des mots, l’extrême politesse du vocable qui contrecarre la raideur de son blase.
Le reste c’est autre chose.
C’est du bricolage de phrases et de sons avec, pour premier rôle – hors le sien – son beat-box humain qu’est M. Gerbeck, « grand orchestre de la bouche à lui seul. » Et pour autre rôle prépondérant Dandy Punk, avec sa contrebasse un rien turbulente (on n’est pas loin d’Imbert Imbert). Du rythm’slam riche de mots, riche d’humour. Pas tant dans la drôlerie des mots d’ailleurs, mais dans la façon de les agencer, dans la musique aussi et surtout, parfois souvent dans les bruits : c’est là, sur les portées, que se niche l’humour, qui se frotte avec la gravité des vers.
A ceux qui ne verraient instinctivement en ce disque qu’un côté foutraque, conseillons-leur de suite la deuxième piste : un très bel hommage au ministre du front populaire Léo Lagrange, La vie est là Léo, celui qui a « donné un peu d’air aux gens d’ici », « bonnes vacances à tous les travailleurs », agréable façon de rappeler à notre mémoire ces socialistes qui ont donné des congés aux gens alors que ceux d’aujourd’hui les obligent à travailler le dimanche.
Après un tel titre, on écoute le reste d’une autre façon, plus attentive. Comme ce très joli Décalé, sur celui qui est différent, à vivre vie et sommeil pas comme les autres : « Laissez-moi la respiration ! »
Bon, malgré la prosodie de zoB’, je sens bien que ce disque ne concernera pas pour autant les pointillistes de la chanson, ceux qui font religion du beau vers musiqué à la seule guitare ou au piano. Encore une fois dommage car ce zoB’-là n’a rien d’une tête de nœud, mais d’un vrai artiste qui a des choses à nous dire. En l’occurence à nous chanter.
zoB’, La vie presque belle, autoproduit 2015. Le site de zoB’, c’est ici.
Sans être déZOBligeante, je trouve son pseudo un peu CONsternant ! mais les vapeurs de jazz qu’il dégage sont enivrantes .