Melissmell, l’énergie du désespoir
11 avril 2015, MJC Venelles (13)
Nous l’avions connue révoltée, hurlant d’une voix rauque si particulière, le poing levé, Aux armes… etc, cette Marseillaise « enculée par l’Internationale » (sic) qu’elle nous chante encore en fin de récital.
Dans un spectacle parfaitement rôdé, elle semble comme apaisée, le sourire triste, d’une grande douceur dans La colère qui lui fait trembler la voix… c’est finalement encore plus efficace ! Une ampoule électrique crée des ombres et des lumières à la Georges De la Tour, transparaît sur sa main ou sculpte ses traits en reliefs.
Et pourtant, ce n’est qu’une apparence, la révolte gronde toujours en celle qu’une réforme mal pensée a évincé de son statut d’artiste intermittente… celle qui ne s’habitue jamais au monde et à ses injustices, celle qui souffre de vivre.
Elle parle peu, Mélissmell, elle crie, elle chante, nuance sa voix, assure son geste, en communion avec son public, tout dévoué à son interprète. Qui lui fera une ovation debout en fin de parcours. Elle lui fait face, sans crainte et sans hésitation : « La musique est une onde, un pulseur dans le coup (…) La musique est une arme, les mots ses munitions. »
Cette petite femme un peu carrée a arrondi les angles. C’est une femme impliquée, douloureuse parfois, touchante toujours, que dis-je touchante, poignante :« Ce matin le printemps a peine à s’imposer (…) Quelques années à jouir, quelques autres à pleurer / Des années à chercher un peu de vérité. »
La rage au ventre, elle prend la route, chante Déserteur en un déchirant canto hondo, continue cette voie sans issue, « La route est une impasse où l’horizon se noie », joue quelquefois d’une main d’un petit piano rouge d’enfant dont les notes sonnent comme une cloche aigrelette, de l’autre d’une guitare-jouet elle aussi, amplifiée pour plus d’effets.
Un seul piano, et Matu, tout aussi rugueux qu’elle, qui ne sourit pas, mais attentif, presque tendre, tout à sa musique et son émotion, sobre et battant le clavier comme un tambour, en de grandes envolées envahissantes.
Sa voix fait le miracle ; lorsque elle dit « Je la vois couler sur ta joue / Et emprisonner la lumière » la larme brille vraiment sur la sienne, des nôtres aussi… Pour évoquer ses souvenirs, elle redevient petite fille, cassée d’émotion. Et neige sur elle le désespoir (Écoute s’il pleut).
Telle une automate, elle tourne sur elle-même… Les cheveux se lâchent, les chaussures puis les chaussettes volent, voici qu’elle reprend du poil de la bête, de ce loup qu’elle fait hurler dans la salle, ce loup dans la gueule duquel vont se jeter Les brebis… La révolte l’emporte sur la souffrance, « le rockn’roll est mort », vive la révolution, « bang bang je shoote. » Et la voici dans ses engagements, c’est l’heure de parler politique, écharpe rouge en bandoulière.
Agenouillée sur ses talons, tandis que le piano monte en notes dramatiques, elle se balance au son de ce rythme répétitif : « Non Madame rien n’est grave / Mais c’est juste un hommage à la mélancolie » qui évoque ce monde de domination masculine qu’elle récuse.
Dramatique, elle l’est jusqu’au bout, et ses amitiés finiront mal. La dernière chanson rend hommage à Mano Solo : « Tout a une fin, c’est peut-être ça qui est bien. »
Le facebook de Melissmell, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’elle, c’est là.
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