Juliette, comme elle en parle
« Comme on nous parle » avec Juliette, France Inter, 14 octobre 2013,
C’était lundi dernier, à 9 h, avec Pascale Clark sur ma radio. Notre Juju toulousaine est venue faire sa promo, plus exactement la promo de son dernier album, Nour, comme elle l’a déjà faite sur cette même radio le 20 septembre avec André Manoukian dans le rôle de l’interviewer. Bon, franchement il avait été difficile d’y saisir quelques remarques pertinentes sur la Chanson, y compris celle de Juliette, tant on nous y a abreuvés de plaisanteries, gaudrioles et pas toujours du meilleur goût ! Pourtant j’y avais cueilli une information de taille : Juliette recevra cet automne la Légion d’Honneur qu’elle accepte (si, si !) et que son « patron » (c’est ainsi qu’elle le nomme) lui remettra, à savoir Pascal Nègre.
Je ne saurais pas trop dire pourquoi, mais je ne parviens pas vraiment à me réjouir de la nouvelle.
Au bout de trente ans de carrière et douze albums, ce dernier est estampillé album Inter. Il était plus que temps me direz vous… Alors, il est normal que Juliette se prête à l’exercice de la promotion tous azimuts. Il est à parier que l’on entendra encore La petite robe noire ou le diable dans la bouteille. Ce n’est pas moi qui m’en plaindrai car ce sont de vraies pépites !
Juliette est fière de son dernier né et personne ne contestera sa parole quand elle le présente comme abouti, construit, équilibré, varié dans les registres et les styles musicaux, quand elle souhaite qu’il soit écouté en entier et dans l’ordre, avec ses plages de silence, ses respirations, quand elle admet qu’il y a du lourd et que c’est la fonction de la chanson que de dire l’important, y compris l’indicible, en restant dans la forme requise de l’objet chanson .
Qu’entend-elle par là ?
Pour Juliette, c’est un peu comme « une nouvelle », un « court métrage » ; elle se doit d’en faire quelque chose précieusement écrit qui va au bout de son sujet. Parfois c’est rapide, d’un seul trait de plume, parfois elle y travaille beaucoup sans que le résultat en dépende vraiment. Mais elle insiste pour dire que la chanson qu’elle pratique s’inspire d’une réalité, les images doivent être claires, dit-elle ; elle oppose sa chanson à une forme d’obscurcissement du sens, à l’intention poétique, édulcorée, aux états d’âme, cultivés par la chanson d’aujourd’hui. Et la musique ? L’habillage sonore - sans limites - se fait en fonction de ce qu’elle raconte. A chaque histoire son style musical.
Bien sûr, nous avons eu droit au chapitre sur le féminisme. Féministe, elle l’est, mais tout le temps, et pas sous une forme ponctuellement militante. Le monde de la chanson n’échappe pas au sexisme ordinaire. Mais c’est difficile, délicat de dénoncer dans une chanson. Elle préfère prendre le détour d’un objet, comme cette petite robe noire et commencer par une histoire somme toute très banale : ce placard où la robe est pendue, cernée d’habits virils.
Au détour de l’interview, qui oscille entre les questions sur la femme et/ou sur l’artiste, elle évoque l’enfance, le père musicien, la rareté de la chanson dans son environnement sonore. On y préfère le son cubain, Carlos Gardel. Mais on lui a transmis l’essentiel, le moteur : la curiosité. J’avais le droit de tout voir, de tout toucher… Elle rappelle aussi les débuts, le piano bar à Toulouse où tout le monde connaît Juliette avant même qu’elle participe à la sélection locale du Printemps de Bourges.
Au fond c’est bien d’avoir conservé un prénom pour nom de scène. Il sépare un peu les choses : l’artiste d’un côté, et celle qui écrit chez elle des chansons, Juliette Noureddine.
Le site de Juliette, c’est ici ; la chronique de son nouvel album sur NosEnchanteurs, c’est là. En vidéo, autre émission, autre station, il y a deux ans sur RTL, avec « Rhum pomme » :
J’ai écouté cette émission lundi matin , où Juliette se livre en toute simplicité, faut dire que Pascale Clark a le don de faire parler les gens . Bon, Pascal Nègre ? Légion d’honneur ? C’est vrai que ça chagrine un peu tout ça, mais j’aime tellement Juliette que je lui pardonnerai si elle accepte cette chose qui , certes, n’ajoutera rien à son talent ni à l’estime qu’on peut avoir pour elle . Et si elle la refusait, je serais encore plus heureuse !
Il est souvent souhaitable en effet de séparer l’artiste et la personne privée. Beaucoup d’artistes, dès que la notoriété les atteint, se découvrent des caprices et la complaisance de leur entourage et de leur public n’arrange pas les choses. Je ne sais pas si c’est le cas de Juliette, mais je revendique le droit, lorsque j’achète un CD de l’écouter comme l’envie me prend de le découvrir, voire partiellement et même à la grande rigueur ne pas l’écouter du tout. Alors, que celle-ci « souhaite qu’il soit écouté en entier et dans l’ordre » me fait sourire.
Quant à la Légion d’honneur, tant de gens l’ont sans la mériter et réciproquement, qu’elle a perdu tout de son éclat. Ah ! Le temps où les valeureux grognards de l’empereur allaient au péril de leur vie ensanglanter l’Europe ! Elle avait une autre gueule, la croix non ? Brillant des feux de la conquête, enterrant deux fois les victimes, elle absolvait les égorgeurs, elle valorisait l’obéissance aveugle au tyran, elle était le plus bel instrument de l’arbitraire et du clientélisme.
Juliette peut bien se faire mettre par Nègre la légion d’honneur où elle veut, tant qu’elle continue à faire de belles chansons et qu’on les écoute dans l’ordre où l’on veut !
Je l’aime, énormément, vraiment beaucoup! Et cette légion qui fait quand même partie de notre patrimoine, quand même quoi, même si des boulets l’offrent parfois à d’autres boulets, et bien pour une fois, je trouve qu’elle tombe entre de bonnes mains qui n’ont aucune raison de la refuser. Quelqu’un qui me donne autant de bonheur à l’écouter et la voir redonne d’un coup de la valeur à ce truc que j’estimais dévalué voire parfois honteux! Moi, vraiment, ça me va, et ça me file le sourire, parce qu’à l’accepter, il y a quand même de la malice
(en parlant de malice le code captcha que je dois recopier est « FYSK », amusant… )
Moi ce qui me dérange c’est que, pour être décernée, il faut candidater… donc…
mais j’ai aussi entendu dire que des tiers pouvaient suggérer des postulants… ce qui expliquerait que certains l’ont refusée, ce serait incohérent qu’ils fassent une demande pour la refuser ensuite..
Un petit rappel par cet article qui est un des grands standards de NosEnchanteurs : « La légion d’honneur »
http://www.nosenchanteurs.eu/index.php/2010/08/28/la-legion-dhonneur/
A Jean-Michel : Ceux qui ont refusé la Légion d’honneur (lire l’article) avaient-ils au préalable candidaté ?
Pour éclairer votre lanterne :
Lettre du Président de la République au Premier ministre en date du 11 juillet 2008 relative aux ordres nationaux :
« … j’ai décidé de mettre en place une procédure nouvelle : l’initiative citoyenne. Cette procédure permettra à tout citoyen de proposer une personne qu’il estime méritante pour une première nomination dans la Légion d’honneur ou dans l’ordre national du Mérite.
Si cette proposition est soutenue par 50 personnes dans le même département, elle sera obligatoirement examinée par le préfet de département. Ce dernier procédera aux vérifications habituelles et, s’il juge la proposition justifiée, la transmettra au ministre de tutelle ainsi qu’au grand chancelier. Chaque ministre, au moment d’établir ses promotions, disposera ainsi d’un ensemble plus diversifié pour des choix plus ouverts. »