Cali, le grand jour
Cali, 7 décembre 2012, La Forge au Chambon-Feugerolles,
« Alors ça y est / C’est le grand jour / Tu t’en vas ! (…) La, la la (…) Je regarde tes fesses / Qui m’échappent / Et elles sont pas mal ma foi. » Bon, il sera dit que c’est Cali, bien calé dans ses œuvres, lui et sa singulière poésie, lui et ses ruptures, la violence de ses propos, le couple dans tous ses états, avant et surtout après. Il ne chante vraiment que ça, depuis bientôt dix ans… « J’aurais dû te courir après / Me jeter à tes pieds / Il n’y a plus d’amour-propre / L’amour m’a tué… » Considérant le nombre de couples qui se déchirent mutuellement, ceux qui sont passés par là, ceux qui inéluctablement y viendront, la fourchette commerciale est large pour ce type de propos, pour les propos de ce type. Et, honnêtement, ça fait du bien de chanter avec lui : « J’adore vivre depuis ce matin / Depuis que je sais qui je suis / Que je te quitte que c’est fini / Je m’en vais. » Nos ex apprécieront.
Cali c’est du baume sur nos bobos amoureux, de l’arnica sur nos bosses, de l’eau oxygénée sur nos blessures, ça arme notre courage, notre lâcheté aussi. Ça fait du bien là où ça passe, dans nos oreilles, dans nos coeurs blessés à jamais, nos vies poignardées. L’amour parfait n’existe pas, Cali le sait, nous aussi.
Cali achève actuellement une tournée acoustique, un piano-voix. Formule à l’économie d’un chanteur en perte d’audience ? Pas sûr. En tous cas concert exceptionnel de beauté et de grâce, un des plus beaux je crois qu’on puisse voir. Au piano, Steve Nieve (le complice d’Elvis Costello), éblouissant de talent qui, du jazz au menuet, porte son instrument à des sommets quasi inégalés. Nous sommes dans l’intime, comme jamais, d’un artiste qui le temps d’une tournée fait fi de batterie et autres instruments amplifiés. A nu, presque. Le cœur l’est, qui semble battre plus fort encore. Sur une scène où seul trône le piano à queue, il faut aller au charbon pour séduire, pour convaincre. Certes, il y a l’armada des fans, des femmes (savent-elles au moins ce qu’il chante ?), mais pas tant que ça. Et la formule épurée peut, au moins au début, déconcerter. L’adhésion ira grandissante. Car Cali n’est pas que le produit d’un dispositif musical scénique : il est Cali dans son exubérance, sa totale générosité, son rapport au public. « C’est sur le bord du lit / Au bord de mes lèvres / Vous avez posé / Le coin de vos lèvres… »
Cali chante l’amour, certes. Et le temps qui passe, la souffrance, les deuils. Ça et la guerre, ceux qui y vont, ceux qu’on fusille. Comme ceux de L’affiche rouge, d’Aragon et Ferré, dans une remarquable interprétation. Ou ceux de Giuseppe et Maria : « La mort ne fait plus peur / Comme j’ai de la chance / De partir amoureux de toi / Ils me fusilleront / Peut-être derrière la maison / De chacune des plaies / Coulera notre amour. »
Récital au répertoire singulier, entre rupture et guerres, pas franchement avenant. Et qui pourtant fait grand moment. Mais Cali est doué. Cette tournée en piano-voix fait définitivement la preuve qu’au-delà de la bête de scène qu’on savait, il est un formidable interprète.
Oui, et un duo surprenant avec Olivia Ruiz hier soir sur une chanson d’Alain Bashung » Osez Joséphine » . Dans le Téléthon sur France 2 .